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modérés ce que l’on appelait leurs « complaisances » envers l’Allemagne. Il disait, dès cette époque, qu’il espérait ne pas terminer sa carrière ministérielle avant d’avoir réalisé un rapprochement franco-anglais. Ces dispositions devaient rester, longtemps encore, sans se préciser ni se réaliser. L’affaire de Fachoda, les négociations pénibles qui précédèrent la convention du 21 mars 1899, n’étaient guère favorables à un rapprochement. Puis vinrent la guerre sud-africaine (octobre 1899-juillet 1901) et, en Chine, l’insurrection des Boxeurs et l’expédition de Pékin (1900). Les événemens, plus que les hommes, conduisaient la politique. Les ministères présidés par M. Charles Dupuy ou par Waldeck-Rousseau, qui avait reçu la forte empreinte de Gambetta et de Jules Ferry, continuaient à pratiquer les anciennes méthodes d’équilibre, au milieu de troubles intérieurs qui ne permettaient guère au dehors qu’une politique au jour le jour, sans initiative et sans envergure. Lors de l’expédition de Chine, la présence du maréchal de Waldersee à la tête de l’armée internationale, dont Guillaume II voulait faire comme le symbole de l’hégémonie militaire allemande, est acceptée par le Cabinet de Paris ; malgré la réserve qui stipule l’autonomie de chaque corps de troupes, nos soldats paraissent marcher, sinon sous les ordres, du moins sous la haute direction du maréchal, aide de camp de l’empereur allemand. Heureusement, quand le maréchal arrive, les légations sont délivrées, les Boxeurs dispersés, la guerre finie. Dans cette crise, « tout se passe, comme on l’a dit spirituellement, entre le départ trop précipité d’un amiral anglais, et l’arrivée trop retardée d’un maréchal allemand. » Les officiers et les journalistes de toutes les puissances remarquèrent l’accent de loyale camaraderie militaire, en même temps que de réserve et de dignité, dont furent empreintes les relations des officiers et des soldats allemands et français. Le dévouement de nos troupiers, sous la direction du colonel Marchand, lors de l’incendie du Palais où périt le général Schwarzof, sous-chef d’état-major du corps expéditionnaire allemand, leur valut les remerciemens du gouvernement de l’Empereur.

En Chine, les troupes des deux nations apprirent à s’estimer et à se respecter mutuellement. Au contraire, les Anglais, mal représentés par des troupes indiennes (c’était pendant la guerre de l’Afrique du Sud), étaient tenus à l’écart et sympathisaient