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l’exercice des prérogatives épiscopales, en les dispensant du serment d’obéissance, les vicaires capitulaires ou administrateurs épiscopaux reconnus par l’Eglise ; et de supprimer, dans les diocèses en détresse, les commissaires laïques préposés à l’administration des biens. Les patrons des bénéfices, les électeurs paroissiaux, avaient été, en 1874, invités à nommer eux-mêmes les curés, dans les paroisses que l’évêque maintenait vacantes : un article du projet nouveau subordonnait à l’autorisation des présidens supérieurs l’exercice de ce droit. La loi de 1875 avait suspendu le paiement des crédits que prévoyait pour l’Église le budget de l’Etat : un article autorisait le ministère à les rétablir à son gré, là où bon lui semblait. Les lois de 1873 avaient institué l’appel aux autorités civiles contre les décisions disciplinaires ecclésiastiques : un article supprimait le droit d’appel pour les victimes de ces décisions et réservait aux seuls présidens supérieurs la faculté de manier cette arme. De par les lois de Mai, on voyait s’essouffler sur la piste des prêtres délinquans toutes les autorités judiciaires et policières : un article stipulait que seuls les présidens supérieurs auraient le droit de les poursuivre ; ainsi l’Etat pourrait, selon son caprice, punir ou ne pas punir les délits de messe, de confession, de catéchisme. La loi de 1875 contre les ordres religieux avait laissé subsister les maisons congréganistes destinées au soin des malades : de par le projet nouveau l’Etat, pourrait, à sa fantaisie, autoriser ou prohiber l’installation de nouvelles maisons de religieuses hospitalières, permettre ou défendre aux nonnes d’abriter des enfans en bas âge, et retirer ces licences, brusquement, après les avoir accordées. La loi de 1875, qui créait vis-à-vis de la hiérarchie une représentation des fidèles, excluait les curés de la présidence des conseils d’Eglise : l’Etat, en vertu du projet nouveau, devait être libre de régler à sa façon cette question de présidence, même en faveur des curés. Enfin les lois de 1873’interdisaient toute besogne sacerdotale aux clercs qui n’avaient pas subi l’examen d’Etat, à ceux qui avaient été élevés à l’étranger, aux prêtres de nationalité étrangère : le ministère demandait qu’on l’autorisât à fixer les principes d’après lesquels il pourrait dispenser ces diverses catégories de prêtres des exigences de la loi.

C’était un étrange projet, et fort habilement conçu, par un chancelier jaloux d’omnipotence. Qu’il fût voté, tel quel, et