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MULHOUSE.

Louis XV le Bien-Aimé. À Mulhouse, il reste peu de vestiges des siècles écoulés : quelques débris de remparts, quelques hôtels, la tour du Bollverk, l’hôtel de ville qui date de la Renaissance, et c’est tout ; uniquement industrielle, elle étend, sous la fumée de ses usines, résistant aux changemens de régime, aux révolutions et aux guerres, l’admirable témoignage de ce qu’ont su réaliser l’initiative, l’intelligence et le labeur alsacien.

Si curieuse que soit l’histoire des villes d’Alsace, l’histoire de Mulhouse l’emporte encore peut-être en intérêt, — si diverse dans la politique : ville libre impériale, puis petite république alliée à la Confédération suisse, puis à peu près indépendante, puis rattachée sur sa demande à la France ; — si soudaine et si magnifique dans le domaine industriel : d’abord ville agricole, ne venant à l’industrie que très tard, mais s’élevant tout de suite au premier rang des centres industriels et proposée très vite comme modèle ; — si particulière enfin avec la fondation et le rayonnement de ses grandes familles.

I

Réduits à des conjectures sur l’origine de Mulhouse, les annalistes la cherchent volontiers dans son nom même : moulin (Mühle) et maison (Haus) construits au bord de l’Ill par des ermites de l’ordre de Saint-Augustin, à une époque imprécise. De là assurément la roue de moulin rouge sur fond blanc et maintenue par deux lions, qui figure ses armoiries. Quoi qu’il en soit, une bourgade naquit, dont le nom est cité pour la première fois au VIIIe siècle, et qui faisait partie de l’Alsace, et, en Alsace, de la contrée appelée Sundgau. Tour à tour cédée, avec l’Alsace, par les partages carolingiens à l’empereur Lothaire, puis à son fils Lothaire II, puis à Louis le Germanique, elle apparaît comme ville impériale, en 1236, par acte de Frédéric II. Ces villes libres impériales, qui étaient au nombre de dix, en Alsace seule, au XIVe siècle, donnaient de l’argent aux empereurs, les servaient contre les empiétemens des grands vassaux, les recevaient avec une cérémonieuse déférence, et les empereurs, qui n’étaient pas riches et qui avaient beaucoup d’ennemis à combattre, leur reconnaissaient, — et c’était en termes propres