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des formes chrétiennes du Moyen âge. Mais, précisément en raison de ce qu’il y avait en elle de peu conforme à l’esprit classique, elle fut peu imitée en Italie : mais elle eut un très grand succès en France où les souvenirs gothiques, même au XVIIIe siècle, furent encore très vivaces. Dès IGGI, la façade de Sainte-Agnès fut imitée à Paris, au Collège des Quatre-Nations (Institut).

Borromini a beaucoup aimé les clochers, les coupoles, les flèches aiguës, mettant dans leur ordonnance les mêmes formes originales que dans ses intérieurs d’église, cherchant par des variations de courbes, par l’opposition des saillies et des rentrans, à leur donner plus de légèreté et de grâce aérienne.

Dans son œuvre, à côté de la flèche de Saint-Yves et des clochers de Sainte-Agnès, il faut faire une place exceptionnelle au clocher de S. Andrea delle Fratte, et au grand tambour qui devait recevoir la coupole de cette église. Cette œuvre surprenante par le caprice de ses détails est plus remarquable encore par son impressionnant effet d’ensemble. Plus que toute autre, elle fait revivre à Rome la force de Michel-Ange. Quoique inachevée, quoique semblable à une ruine, elle est un des monumens les plus grandioses de cette ville qui en possède tant. Borromini n’a jamais rien fait de plus beau et de plus saisissant.

La grande nef de Saint-Jean de Latran, qui fut une des œuvres les plus importantes de Borromini, ne fut pas une construction nouvelle, mais une de ces modernisations d’anciennes basiliques qui furent alors si fréquentes. C’est encore le disciple de Michel-Ange que nous trouvons ici. Borromini se souvenant de la bibliothèque de S. Lorenzo, des bâtimens du Capitole, des murs extérieurs de Saint-Pierre, conçoit des pilastres gigantesques qui vont du sol jusqu’au plafond, avec des bases et un entablement aussi peu développés que possible. L’effet est solennel et la grandeur et la richesse sont augmentées par des niches colossales contenant les statues des apôtres et par les peintures et les bas-reliefs dont les murs sont couverts.

La façade de Saint-Charles aux quatre fontaines, qui fut faite en 1667, plus de vingt ans après le commencement de l’église, est certes, non la plus belle œuvre de Borromini, mais une des plus notables dans sa volonté de créer une architecture nouvelle. Les séparations sont faites par des colonnes entre lesquelles sont