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PSYCHOLOGIE
DE LA
RÉVOLUTION CHINOISE

La Révolution chinoise a surpris le monde par son apparente spontanéité, par sa rapidité, par son dénouement, ou plutôt par le dénouement de son premier acte qui a changé une antique monarchie en république toute moderne. Au mois d’août 1911, le ciel diplomatique était encore sans nuages du côté de Pékin. Les luttes ou les accords des syndicats financiers qui se disputaient les concessions de mines et de chemins de fer dans l’Empire chinois ne passionnaient pas le grand public. Parfois, sous la rubrique Nouvelles de l’étranger, les journaux d’Europe donnaient, en termes succincts, quelques vagues renseignemens sur une révolte qui venait d’éclater dans le Seu Tchouan. Mais, depuis le soulèvement boxer et la répression de 1900, le pillage de quelque cité, l’incendie de quelque église, l’assassinat de quelque missionnaire paraissaient être des incidens bénins, d’ailleurs de plus en plus rares, dont la suppression serait complète dans une Chine bientôt réorganisée. Explorateurs, diplomates, attachés militaires, prônaient les efforts d’un gouvernement réparateur, le progrès des idées et des pratiques occidentales dans un monde officiel jusqu’alors rebelle à toute innovation. Les édits prohibitifs de l’opium, l’envoi d’étudians dans les Universités étrangères, la modernisation des examens du mandarinat, l’essai d’institutions parlementaires succédant au pouvoir absolu, l’application projetée des principes occidentaux à l’organisation des services publics,