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de ses prédécesseurs celui de roi des Dominions Britanniques d’au-delà des mers. Cette fois, il en a été autrement. Dans le compte rendu, plein de si fins aperçus politiques et sociaux, que M. le comte d’Haussonville a donné du couronnement aux lecteurs de la Revue, il n’a pas manqué de l’observer : « Ce qui est le plus remarquable, le plus nouveau, le plus significatif, ce sont les onze étendards. On ne voit pas seulement, en effet, l’étendard royal porté par lord Lansdowne, l’étendard de l’Union porté par le duc de Wellington, l’étendard de l’Inde porté par lord Curzon de Kedleston, mais encore les étendards des différens Dominions qui, pour la première fois, figurent dans un couronnement royal. » Et plus loin : « Hier une place a été faite à Westminster aux drapeaux des colonies. Aujourd’hui, dans le cortège royal, une place plus importante encore sera faite à leurs troupes et à leurs représentans. C’est la fête des Dominions presque autant que la fête de l’Angleterre[1]. »

Ainsi les gouvernans des jeunes et lointaines démocraties qui vivent libres en union avec la Grande-Bretagne sont venus s’asseoir à côté des Pairs du Royaume, des rajahs de l’Inde, des représentans de tous les rois du monde. La personne même de ces hommes témoigne de la vitalité de l’Empire, de la merveilleuse combinaison de l’esprit de conquête et de l’esprit de liberté qui en a fondé la puissance et en assure la durée. Des cinq colonies autonomes de l’Angleterre, deux, la Nouvelle-Zélande et Terre-Neuve, sont des pays insulaires, d’une étendue inférieure à celle de la mère patrie. Elles ne sont point dénuées de ressources. Mais ce qui permet surtout « les longs espoirs et les vastes pensées, » ce sont ces immenses territoires de l’Australie, du Canada, de l’Afrique du Sud qui couvrent des millions de kilomètres carrés et compteront bientôt des dizaines de millions d’habitans. Quels sont donc les premiers ministres qui sont venus les représenter dans ce monument essentiellement national et traditionnel qu’est pour la Grande-Bretagne l’abbaye de Westminster ?

L’un a gardé l’aspect fruste du mineur écossais que fut Andrew Fisher, avant de quitter les houillères de Kilmarnock pour passer, en Australie, où, après s’être enrôlé dans des syndicats presque révolutionnaires, il est devenu le chef d’un

  1. Voyez la Revue du 15 juillet 19I1.