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Un vent bizarre et dur, un vent mystérieux,
Tu tremblais ! Tu levas ton regard vers les cieux,
Peut-être sans avoir de pensée, et peut-être
Pour y chercher le Dieu justicier, le Maître
Des Lois, en qui la force à l’équité s’unit.
Celui qui voit, qui sait, qui juge et qui punit.
Niobé ! Niobé ! Debout sur un nuage,
Apollon radieux contemplait son ouvrage.
……………………….
Hautain, et d’une main négligemment habile
Remettant au carquois une flèche inutile !
Alors tu compris tout ! Et soudain la fureur.
Te saisissant au bord abrupt où ta stupeur
Vacillait au-dessus d’un gouffre de démence,
Te rejeta dans l’âpre et claire connaissance.
Dans ton malheur, dans ton vouloir, dans ton orgueil.
Ton orgueil indompté, la cause de ton deuil.
Le front haut, tu crias : « Fils digne de ta mère,
A qui traînant partout sa grossesse adultère.
Les îles, les cités, les bois ont refusé
Un abri dont leur sol fût resté méprisé.
Et qui n’a pu trouver, pour cacher ta venue.
Qu’une île inhabitée, et rocailleuse et nue,
lâche, ne sais-tu combattre que de loin ?
Au combat de la lutte et au combat du poing.
Tu n’aurais point osé défier tes victimes !
Les lauriers de l’embûche et les palmes des crimes
Tu peux les rapporter à ta mère, ô héros !
Toi qui frappes de loin, sans prononcer les mots
……………………..
Dont le défi prévient l’ennemi désarmé !
Va ! le cœur de ta mère est peut-être alarmé
Du grand danger auquel t’exposait ton courage !
Va-t’en la rassurer ! Moi, j’aime mieux l’image
De chacun de mes fils mort que déshonoré
Par l’infamant exploit dont tu restes paré !
Mais dis-lui qu’en ces bras que ton forfait dévaste.
J’ai, pour l’humilier dans son orgueil néfaste,
J’ai plus d’enfans encor, en gardant la moitié,
Qu’elle avec vous deux seuls. Et son inimitié