Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 11.djvu/877

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pays, la seule admise en France. Rappelons ses traits caractéristiques. Elle est automobile, c’est-à-dire que, mise à l’eau, à petite distance du bateau lanceur, par la chasse d’une faible charge de poudre, elle se trouve capable d’effectuer par sa propre force interne le parcours à grande allure qui lui reste à franchir pour atteindre le but.

C’est un sous-marin en miniature, muni d’hélices et pourvu d’une machine mue par l’air comprimé. Une forte charge de fulmi-coton doit être mise en feu par une étoupille, elle-même enflammée par le choc au but. Cet appareil destructeur, si formidable, risquerait d’anéantir le bateau même qui l’emploie ; aussi n’est-il armé qu’après un certain parcours, durant lequel le déplacement rapide de la torpille dans l’eau fait tourner une pointe munie d’ailes en hélice et dévisse ainsi le percuteur pour lui donner du champ.

La torpille, ne devant pas naviguer à la vue ni dans l’agitation de la surface, porte un double appareil régulateur d’immersion ; elle frappe ainsi la coque ennemie plus bas que la cuirasse. A cet effet un piston hydrostatique, équilibré pour une profondeur donnée et un pendule qui réagit à toute inclinaison agissent ensemble sur le gouvernail de profondeur.

Inventée en 1868, elle fit ses premières armes en 1877 dans la guerre entre le Chili et le Pérou. (Les premiers bâtimens torpilleurs, créés depuis 1874, n’utilisaient que la torpille portée, c’est-à-dire une charge d’explosif fixée au bout d’une hampe que le torpilleur allait heurter contre l’ennemi.) Le modèle Whitehead de 1877 pesait 177 kilogrammes, en portait 15 d’explosif. Son diamètre était de 38 centimètres et la pression initiale au réservoir d’air de 70 kilogrammes. Sa machine lui donnait des vitesses décroissant de 10 nœuds et demi à 6 nœuds, pour un parcours sous l’eau de 200 mètres. Mais, quand on voulait en régler le mécanisme de façon à économiser la dépense d’air dans le moteur et réaliser par suite des parcours d’environ 1 500 mètres, correspondant à sa portée limite, les vitesses ne dépassaient pas 7 nœuds. C’est ainsi que nous voyons, en 1878, le croiseur péruvien Huascar suivi par une torpille anglaise qui ne put jamais le rattraper : il filait 11 nœuds, elle 9 seulement.

Passons maintenant au modèle 1802. Il pèse déjà 530 kilogrammes, dont 04 d’explosif. Le modèle 1900 enfin en porte 113 kilogrammes, sur un poids total de 650 ; et l’air y est emmagasiné