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de certains certificats pour que l’Etat les autorisât à faire acte de prêtres ; mais cette autorisation, tout exceptionnelle, ne devait pas, dans la pensée du Pape, s’étendre aux promotions sacerdotales ultérieures. Même après les explications que publia l’évêque, l’initiative qu’il avait prise paraissait incompatible avec les efforts du Vatican et de l’épiscopat pour faire abroger les lois bismarckiennes sur l’éducation des prêtres. Derrière le bruit que firent certaines feuilles du Centre, fallait-il discerner, peut-être, une intention secrète de crier halte à Léon XIII sur la voie des concessions ? C’est possible, mais Léon XIII jugea qu’en principe le bruit était justifié ; il pria l’évêque de retirer sa circulaire ; et la réunion épiscopale de Fulda, au mois d’août, défendit aux clercs de réclamer la dispense de l’examen d’État, ou de se procurer des certificats d’assiduité universitaire pour s’en prévaloir vis-à-vis des autorités civiles : ceux qui violeraient la défense seraient exclus de l’ordination.

En d’autres temps, ce désaveu dont un évêque conciliateur était l’objet, ces instructions sévères que rédigeait l’épiscopat, eussent provoqué, dans les cercles officiels, un tel mouvement de déplaisir, qu’on aurait, bien vite, accusé l’Eglise de provocation. Mais Rome et Berlin s’abandonnaient, peu à peu, a cet esprit véritablement pacifique qui accorde crédit à tous les symptômes de détente et dédaigne, au contraire, d’exacerber les difficultés imprévues. Les décisions prises à Fulda furent peu remarquées ; le document auquel l’opinion prussienne fit attention fut la lettre collective que publia l’épiscopat. Elle était adressée aux fidèles de Prusse : elle louait leur concorde, leur esprit de sacrifice ; elle dénonçait les périls qui les guettaient, les lacunes de l’école, le manque de prêtres, les vides que laissaient les ordres religieux disparus ; elle visait les lois hostiles, mais sans les attaquer nommément ; elle faisait appel à l’union intime de la foi, à la prière continuelle. Le ton de cette lettre était très calme, plus plaintif qu’accusateur. Quelques semaines se passaient, et l’assemblée générale des catholiques allemands se réunissait à Münster. La tristesse des évêques au sujet de la disparition des ordres religieux fut pour Schorlemer-Alst l’occasion d’un grand discours, dans lequel il réclamait le rappel des Jésuites. Il déclara, et Windthorst déclara, qu’on ne voulait plus permettre au gouvernement de laisser l’Eglise « s’embourber dans ce qui restait du Culturkampf. »