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directe de l’évêque, certaines conditions de recueillement, lui faciliter un certain apprentissage de la vie intérieure, l’amener, avant qu’il affronte le monde, à bien tenir son âme en main, et l’entourer d’une austère ligne de défense, qui puisse le protéger contre les tumultes du dehors, menaçans pour l’intégrité de sa vocation. Tout le long du XIXe siècle, les deux systèmes, en Allemagne, avaient concurremment fonctionné : de temps à autre, ils entraient en polémique ; ils se justifiaient l’un et l’autre, en alléguant les bons prêtres qu’ils avaient produits ; et leur querelle, par cela même, tournait, et tourne encore, à l’honneur de l’Eglise. Ce que tentait la Prusse en 1884, c’était d’amener l’Eglise à renoncer à l’un de ces systèmes, celui des grands séminaires.

Mais les évêques réunis à Fulda déclarèrent impossible d’y renoncer ; ils maintinrent leur droit d’avoir des grands séminaires, ou, sous un autre nom, des institutions d’enseignement théologique dont ils seraient seuls maîtres ; ils affirmèrent aussi que l’Eglise avait son mot à dire dans les facultés de théologie, soit qu’il s’agit d’y nommer des professeurs, soit qu’il fallut apprécier leur enseignement, soit qu’il y eût, peut-être, à les révoquer ; ils admirent que les clercs pouvaient suivre certaines leçons sur les sciences profanes, mais à la condition que les maîtres qui les donnaient fussent jugés capables d’exercer sur eux une influence heureuse, et dénièrent à l’Etat, d’ailleurs, le droit de rendre obligatoires ces matières d’enseignement ; ils demandèrent, enfin, l’abrogation des articles des lois de Mai par lesquels l’État singerait dans le fonctionnement des maisons d’éducation cléricale. Telles furent les décisions que l’épiscopat prussien transmit au Pape ; et l’un des membres de cet épiscopat, Mgr Korum, évêque de Trêves, publiait, cette année même, sous un pseudonyme, une brochure en faveur des grands séminaires, que Rome remarqua, et que Berlin, aussi, remarqua. Ainsi s’affirmait contre les lois relatives à l’éducation du clergé l’accord des évêques et du Saint-Siège ; et Léon XIII continuait de dire à la Prusse : Arrangeons-nous pour ôter ces lois de votre code, ensuite j’ôterai Ledochowski du siège de Posen. Des voix s’élevaient, reprochant à Léon XIII de prolonger les souffrances de la Posnanie et celles de la Prusse Rhénane ; on prêta même à Schloezer des propos de ce genre, qu’il se hâta de faire démentir. Mais puisque Bismarck tardait