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— et d’une telle activité qu’on ne l’assume pas sans inquiétude.

Il m’a semblé qu’une sage modestie et la prudence m’engageaient à mettre mes jugemens sous le couvert de principes qui ont, en eux-mêmes et indépendamment de moi, leur qualité.

Je n’ai point osé dire que je tâcherais de suivre l’exemple de mes devanciers, — dans cette maison qui a, pour m intimider, les voisinages qu’elle me donne et ses grands souvenirs : — car le zèle ne suffit pas. Mais, auprès de mes lecteurs, la recommandation de l’éminent écrivain qui, m’ayant précédé à cette place, m’y fait accueil avec tant de grâce est mon encouragement : et je l’en remercie.

Puis il y a, pour toute opinion, fût-elle vaillante, les adoucissemens que lui apporte la crainte de l’erreur. Et les méandres de l’erreur sont, parfois, des chemins d’approche, autour de la vérité.

Autour de la vérité, il y a le vaste pays de l’incertitude, où l’on découvre des paysages délicieux, et des villages qui ne sont pas tous extrêmement distans de la belle capitale : on s’y attarde sans inconvénient, pourvu qu’on sache qu’on est en route, et qu’on passe.

Le critique ne franchira pas trop hardiment ce pays de l’incertitude, s’il songe qu’il rencontrera peut-être le génie, si déconcertant et en face de qui l’on ne doit que s’excuser d’avance.


ANDRE BEAUNIER.