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travaux sont aujourd’hui exécutés mécaniquement et le manœuvre de machines est de plus en plus substitué à l’ouvrier d’état. A l’usine de Jallieu, le salaire du manœuvre de machines est de 4 francs, celui du manœuvre ordinaire de 3 francs, alors que les salaires de forgerons, tourneurs, ajusteurs, varient de 5 à 6 francs. L’écart reste sensible, mais nous avons vu le bon ouvrier agricole capable, lui aussi, de réaliser une plus-value annuelle de 100 francs au moins sur le salaire de l’ouvrier ordinaire et, de ce fait, atteindre 900 francs pour 240 jours de travail ou 3 fr. 75 par jour moyen.

« Si l’on compare ensuite la différence de prix entre la vie à la campagne et la vie à la ville, on arrive à cette conclusion absolue que les salaires agricoles actuels, malgré le chômage imposé par les intempéries sont :

1° Aussi satisfaisans que ceux de l’industrie ;

2° Qu’ils ont progressé plus que les salaires industriels par le seul jeu de la loi économique de l’offre et de la demande, alors qu’en dix ans, à Grenoble, l’accroissement des salaires des manœuvres et des ouvriers des divers corps d’état, malgré les grèves et les revendications, n’a été que de 6 pour 100, variant de 0 à 17 pour 100 selon les spécialités. »

Est-il besoin de répéter que ces faits observés avec soin et avec la plus entière sincérité présentent le plus grand intérêt ? En nous appuyant sur eux et sur ceux qui précèdent, il nous sera donc permis de formuler une conclusion générale.


CONCLUSION

Au début de cette étude, nous nous sommes demandé quelle était la condition matérielle du salarié rural. L’observation des réalités nous a permis d’affirmer tout d’abord que les salaires s’élevaient. Jamais, depuis quarante ans, cette progression n’a été plus générale et plus rapide que durant les premières années du XXe siècle. La hausse des denrées alimentaires réduit, il est vrai, le pouvoir d’achat du salaire, mais l’ouvrier rural si souvent propriétaire n’en souffre pas ou en souffre peu. Le domestique nourri chez son patron ne supporte même aucune perte et profite, sans aucun retranchement, de l’augmentation de ses gages. Rien de plus faux à ce propos que de voir dans le patron