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comme chez Lombard à Liège, la rigueur et la furia romaines. L’italianisme romantique des van Orley, des Gossart, de van Coninxloo, des van Clève s’acheminait vers le romantisme intégral des Floris. Le « dernier peintre de Bruges » eut pour élèves son fils François Pourbus Ier , Antoine Claeissins et Hubin Boven. François Pourbus Ier fit une belle carrière à Anvers et eut un fils, le célèbre Franz Pourbus II, lequel était peintre en titre de Vincent de Gonzague, duc de Mantoue, lorsque que Pierre-Paul Rubens, engagé à la même Cour, débuta modestement à ses côtés.


Pourbus fut bien le dernier peintre de Bruges, car la médiocre dynastie de Claeissins s’attarde avec un provincialisme persistant aux formules de la vieille école[1]. L’ancêtre fut Pierre Claeissins, peintre et enlumineur, maître en 1529, mort avant 1576, élève, croit-on, de Gérard David. Aucune de ses œuvres n’est connue et peut-être Pierre II et Antoine Claeissins passent- ils à tort pour ses fils. Pierre II, peintre de la ville de 1594 à 1621, fut cartographe, peintre de bannières, polychromeur d’édifices ; en cette dernière qualité, il dirigea la peinture et la dorure des croix, faîte et girouette de Saint-Sauveur. Que penser de ses peintures ? Pas grand bien.

Sa Résurrection de Saint-Sauveur (1585) est froide, violente et criarde ; Pourbus l’aurait jugée sans indulgence, malgré les centurions habillés par un archéologue. Sa Notre-Dame de l’Arbre-Sec de l’Hôpital de la Poterie (1608) peut faire la joie d’un folkloriste avec son étoffage d’ex-voto, ses figurines d’éclopés et d’exorcisés. La Vierge rappelle de loin Gérard David, tandis qu’un Ecce Homo de Saint-Sauveur semble d’un pasticheur d’Antonello de Messine. Le portraitiste a du mérite et quelques-uns des patriciens de la Convention de Tournai (1584, musée communal) ne pâliraient pas trop à côté de ceux de Pourbus. — Antoine Claeissins se forma chez Pourbus, devint peintre officiel de la ville et mourut probablement le 18 janvier 1615. « Peintre de grand style, » dit M. von Wurzbach. L’éloge est démesuré. La Cène de l’église Saint-Gilles (vers 1593) n’est qu’un décalque indigent des Cènes, académiques

  1. Cf. James Weale. A family of flamisch painters. Burlington Magazine, juillet 1911.