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lesquels chicanèrent au moment de payer. Les neuf chœurs des anges assistent au Couronnement, et leur floraison innombrable se dispose en rangées clairement concentriques, un peu à la manière des petits musiciens de Gaudenzio Ferrari à Saronno. David et Ezéchiel, bruns, barbus, et qu’on croirait échappés d’une œuvre de Gérard David, déploient des banderoles dans les angles inférieurs ; au sommet, Dieu le Père et Dieu le Fils couronnent Marie et sont assis sur un trône en style plateresque, expression ultime du gothique septentrional.

Adrien Ysenbrant (Isenbrant ou Hysenbrant) venait de Harlem. Il s’installa avant l’année 1510 à Bruges et y devint, suivant Sanderus, le disciple de Gérard David ; ce dernier l’employa sans doute comme collaborateur (très probablement pour les Noces de Cana du Louvre). Ysenbrant mourut en 1551, ayant exercé son art pendant plus de quarante ans à Bruges. On lui attribue un diptyque consacré à Notre-Dame des Sept Douleurs par Barbara de la Meere, veuve de Jooris van de Velde, bourgmestre de Bruges ; et le catalogue de l’artiste, doctement établi et pesamment rempli, s’échafaude tout entier sur cette attribution ! L’un des panneaux du diptyque est à l’église Notre-Dame de Bruges. Les sept médaillons illustrant les Douleurs de la Reine des Martyrs entourent une Madone, aux mains jointes, vêtue de noir, coiffée de linon blanc et assise sur un trône où le plateresque s’achemine vers les formes de la Renaissance. Le visage immaculé et douloureux de la Vierge laisse transparaître une foi et une résignation célestes. Le poète J. P. van Maie écrivait que la voix seule manquait aux figures d’Ysenbrant. Mais c’est ici une douleur qui n’a plus de voix. Et puisque cette Vierge fait penser avec obstination à Gérard David, ne faudrait-il pas la restituer à ce dernier ? L’autre volet du diptyque (musée de Bruxelles) rassemble Jooris van de Velde, sa femme, leurs neuf fils et leurs sept filles. Si Bruges se dépeuple au temps de sa décadence, ce n’est point la faute de ses notables, les Guillaume Moreel, les Jacques Floreins, les Jooris van de Velde...

Ambrosius Benson serait né en Lombardie ( ?). Reçu franc-maître à Bruges en 1519, il connut deux fois les honneurs du doyenné, — comme Gérard David et Jean Prévost, — et mourut avant 1550. L’œuvre la plus importante de son catalogue (hypothétique) est une Deipara Virgo du musée d’Anvers qui relève de Gérard David et s’apparente curieusement par le type, le