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d’une chapelle à Fort-Beauharnais. Une interruption suit la perte de la colonie du Canada. Mais, vers 1820, la tradition est reprise. Les Canadiens français s’installent sous la protection du fort Snelling, non loin du point où doit s’élever Saint-Paul. En 1841, le Père Galtier fonde Saint-Paul. En 1854, cette ville comptait 3 000 habitans : elle en a 200 000 aujourd’hui.

Saint-Paul fut érigé en évêché en 1850 ; en 1901, époque où Mgr Ireland, placé à la tête du diocèse depuis 1884, célébrait ses noces d’or, la ville était devenue siège métropolitain avec cinq suffragans et comptait 600 prêtres avec 400 000 catholiques et, rien que dans la ville archiépiscopale, vingt-trois églises. Mgr Ireland, dans le discours qu’il prononça, rendit hommage aux explorateurs et aux missionnaires français, n’oubliant pas que lui-même avait fait ses études en France : « Ah ! les prêtres du diocèse de Saint-Paul, ceux surtout des temps primitifs, ceux qui l’ont construit : c’est notre fierté à nous de glorifier leurs noms ! Les premiers catholiques du Minnesota parlaient français, pour la plupart. Mgr Crétin, un Français, tirait de France son clergé : la France est le pays des missionnaires. »

J’ai cité cet exemple et ce texte parce que rien n’explique mieux et n’autorise davantage la part que la France peut réclamer dans l’évangélisation catholique des Etats-Unis. S’il fallait dénombrer tous les services et tous les noms illustres, un livre entier n’y suffirait pas.

Les missions chez les sauvages occupent tout le XVIIe et le XVIIIe siècle. Mais, depuis la guerre de l’Indépendance et après la consécration de Mgr Carroll, évêque de Baltimore, en 1790, c’est l’organisation de l’Église américaine qui devient la grande œuvre catholique. Quand il fut question de recruter et de former le clergé américain, ce fut à M. Emery, supérieur de Saint-Sulpice, que le prélat américain recourut pour fonder un séminaire dans sa ville épiscopale : « Au mois de mars 1791, quatre Sulpiciens accompagnés de cinq séminaristes s’embarquaient à Saint-Malo, et le 3 octobre de la même année, s’ouvrait à Baltimore le premier séminaire américain d’où devait sortir un nombreux et puissant clergé indigène[1]. » Donc, de cet arbre majestueux, ayant pris terre en sol américain, les racines sont françaises.

  1. A. André, le Catholicisme aux États-Unis, p. 63.