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prévenant des risques que courait sa santé. Il dînait et passait la soirée avec l'impératrice, ses enfans et ses petits-enfans, pour lesquels il avait la plus tendre affection. Le visage pâli, les traits quelque peu empâtés, le corps envahi par l'embonpoint, il en imposait plus encore qu'autrefois par sa maîtrise de lui-même, la conscience de sa puissance et sa sereine dignité.

Comme chef d'Etat, on l'avait toujours connu patient et prudent, mais d'une fermeté, qui, dans sa jeunesse, approchait par- fois de la dureté et qui, dans son âge mûr, tendait à l'opiniâtreté ; maintenant il était toujours porté à la conciliation et semblait moins tenir à faire prévaloir ses idées, si chères lui fussent-elles, qu'à unir tous ceux qui l'entouraient. Cette disposition s'accordait d'ailleurs avec les dispositions mêmes du pays ; les désordres de 1905 apaisés, tous les partis désiraient éviter les erremens des années qui avaient précédé la guerre et cherchaient à s'élever au-dessus des querelles mesquines d'autrefois pour faire une politique vraiment nationale. Après la paix de Portsmouth, l'empereur avait rédigé avec Katsura un second programme Post Bellum, modelé sur le premier, qui comprenait l'augmentation de l'armée et de la marine, la création de nouvelles universités et de nouvelles écoles, l'extension aux femmes de l'obligation de l'instruction primaire, le développement de l'enseignement technique, la nationalisation des chemins de fer. D'accord avec Katsura qui voulait rendre ce programme populaire, il en confia l'exécution au marquis Saionji, noble de cour connu pour ses idées libérales, qui avait succédé au duc Ito comme président du seiyukai. Mais le Japon, au lieu de l'indemnité de 1895, avait en 1906 les dettes énormes qu'avaient laissées la guerre. L'exécution du Second Programme Post Bellum présenta donc de grandes difficultés et en 1908 l'empereur rendit le pouvoir à son ministre favori. L'un et l'autre collaborèrent intimement à des entreprises qui leur étaient également chères : les finances obérées furent remises en état, tous les emprunts contractés à de gros intérêts furent convertis en quatre pour cent ; la conclusion de l'accord russe, les bonnes relations établies avec toutes les puissances permirent l'annexion de la Corée ; enfin, tous les traités de commerce expirant en 1911, on les renouvela dans des conditions qui faisaient disparaître les dernières restrictions imposées à l'activité commerciale de l'empire. Sa mission achevée (1911),