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être considérées comme le succès définitif, qui termine une longue période de privations et d'efforts, mais comme le point de départ d'une nouvelle période d'aussi grandes privations et de plus grands efforts ; que, au lieu de rendre possible plus de liberté, de luxe et de confort, les succès obtenus exigeaient l'élaboration d'un programme de travail qui permit d'en décupler les fruits par la discipline et par la méthode. Telle fut l'origine du programme Post Bellum. Il comprenait d'abord une partie financière : l'indemnité chinoise n'était pas consacrée à des rachats d'emprunts, à des conversions d'impôts, elle formait la base d'un système financier plus hardi qui comportait de grands emprunts et d'importans relèvemens d'impôts. À ce plan financier était étroitement lié un plan économique : ne fallait-il pas mettre le pays en état de supporter les charges nouvelles ? Donc, établissement d'une base sûre des transactions par l'adoption de l'étalon d'or ; augmentation du transit par l'ouverture de nouvelles voies de communication ; consolidation du régime économique par une législation bien comprise sur les syndicats ; développement de l'industrie par des encouragemens de toutes sortes et la fondation d'une banque industrielle ; introduction de la métallurgie par la création d'une aciérie appartenant à l'Etat. De si grands progrès matériels n'étaient possibles que s'il se produisait simultanément de grands progrès moraux ; on rendit donc l'instruction primaire gratuite et obligatoire ; on établit l'enseignement professionnel, qui compta bientôt plusieurs centaines de milliers d'élèves ; on développa l'enseignement secondaire et l'enseignement supérieur. Ce que voulait créer le programme Post Bellum, c'était de fait un Japon qui eût l'esprit et les ressources d'une grande puissance ; il fallait donc que ses moyens de défense et d'attaque fussent ceux d'une grande puissance : l'armée fut doublée, la marine reçut des navires du type le plus puissant, tous les services concernant la mobilisation furent réorganisés d'après les expériences faites dans la dernière campagne. Mais il importait que le Japon ne gaspillât pas ses nouvelles forces dans des entreprises mal préparées ; la conclusion du programme Post Bellum était donc un programme diplomatique : devenu la plus grande puissance de l'Extrême-Orient, le Japon ne resterait pas isolé et ne tenterait pas de se mettre a la tête d'une coalition asiatique ; il rechercherait l'alliance d'une puissance européenne pour