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LES ORIGINES
DE
LA SCULPTURE ROMANE

Pendant les cinq premiers siècles du moyen âge on a cessé presque complètement en Europe de faire des statues. C’est là un fait considérable et les historiens l’ont signalé avec raison comme une des preuves les plus certaines que la culture antique était bien morte. A partir du Ve siècle, les écoles artistiques qui se partagent le monde ne font plus de place à la statuaire ; elle n’a pu vivre ni dans l’art byzantin, ni dans l’art musulman, ni à plus forte raison chez les peuples barbares d’Occident. Le bas-relief, destiné à la décoration des édifices ou du mobilier, fut désormais la seule survivance admise d’un art plastique.

Puis brusquement, au XIIe siècle, des écoles de statuaire reparaissent en Occident : des statues sculptées dans l’espace sont adossées aux piliers des cloîtres monastiques ou aux pieds-droits des églises romanes. Alors que l’Orient reste réfractaire à la sculpture en ronde bosse, la statuaire trouve dans les écoles provinciales de France, d’Italie, d’Espagne, d’Angleterre, d’Allemagne, un terrain merveilleux où elle développe de profondes racines. La tradition interrompue se renoue pour toujours et, malgré tout ce qu’elle emprunta à l’antiquité gréco-romaine au cours de la Renaissance du XVIe siècle, la statuaire moderne n’en est pas moins issue des œuvres lointaines dues à nos imagiers romans et gothiques. C’est en grande partie à ses écoles de