Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 3.djvu/453

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

depuis le débarquement à Alexandrie, jusqu’à la nouvelle de la victoire et au télégramme du cher Arthur, sain et sauf, ont été très éprouvantes. Si seulement le cher lord Beaconsfield avait pu être le témoin de ces événemens, voir le Caire occupé par les troupes de l’impératrice des Indes, les services rendus par Chypre…


Cette « fille de soldats » a voulu, conformément aux traditions constitutionnelles, être et rester le chef des forces militaires de l’empire britannique. Formée et guidée par le Prince Consort, elle a lutté avec ténacité et souvent avec succès pour faire respecter son autorité. Elle entend être mentionnée dans les dépêches aux commandans des corps expéditionnaires. Elle réclame la communication de tous les rapports. Elle n’accepte pas des copies, elle veut les originaux. Elle n’admet pas qu’on licencie les troupes sans l’avertir ni la consulter[1]. Elle intervient dans tous les grands problèmes militaires. La nomination dans les écoles militaires de professeurs civils l’inquiète. Elle demande que la défense nationale soit organisée suivant un programme méthodique. Elle insiste pour la création d’un train des équipages : les désordres de Crimée en ont démontré la nécessité. L’embrigadement des troupes est considéré fort justement, par la Reine, comme une réforme indispensable. Elle est opposée à ce que les Indes soient gardées par une armée spéciale : cette création affaiblira et désorganisera les forces militaires du Royaume-Uni[2]. Victoria ne limite pas son activité à l’examen des grands problèmes. Elle s’intéresse aux détails les plus minutieux. Elle veut connaître le stock des approvisionnemens. Elle entend être renseignée sur le nombre des fusils de réserve. Pas une nomination ne passe sans que, avant de signer, elle examine et approuve. Le nom des officiers de valeur est soigneusement noté et fidèlement transmis[3].

Jeune fille, elle ignorait ces problèmes et devait se contenter de rechercher les spectacles militaires ; jeune femme, elle fut initiée par son mari aux choses de la guerre et put exercer, dans toute leur plénitude, ses droits de contrôle. Qu’on ne vienne pas dire qu’ils aient été inutiles. Si le Cabinet avait tenu

  1. Sur ces divers points, consultez la Correspondance inédite, trad. française, t. III, p. 105, 306, 379, 395.
  2. Sur ces divers points, consultez le même ouvrage, t. III, p. 241, 333, 343, 345, 370.
  3. Sur ces divers points, consultez le même ouvrage, t. III, p. 57, 61, 241, 333.