Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 3.djvu/369

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

seconda avec efficacité l’effort de nos troupes. Tombés le 30 septembre 1881 sous les balles des nomades, ou brûlés vifs dans les bâti mens du chemin de fer, le chef de gare Raimbert et huit hommes d’équipe, de la station de l’Oued Zargua, servirent à leur poste la cause de l’expansion française.

Des desseins politiques avaient activé la construction de la ligne de la Medjerdah ; les besoins économiques de la Tunisie, lents à s’éveiller, n’exigèrent qu’après 1891 l’établissement d’un réseau plus étendu. Il fut conçu logiquement sous la forme d’une ligne côtière de Tunis à Sousse, avec embranchement sur les plaines à céréales de l’intérieur, plaine du Fahs, plaine de Kairouan, et d’une ligne de jonction de Tunis à Bizerte. Il s’exécuta selon les règles de la plus stricte économie : voie étroite pour toutes les sections au Sud de Tunis, rail et matériel légers, pas de travaux d’art, pas de signaux, pas de clôtures, même aux gares. Il s’achevait vers 1898 quand se produisit l’évolution, mal connue en France, qui allait changer la face des activités, des budgets et des chemins de fer tunisiens.

La reconnaissance d’un banc de phosphate tri basique de chaux par le vétérinaire principal de l’armée Philippe Thomas, en 1885, près des gorges du Seldja, dans le Sud Tunisien, n’avait eu à l’époque d’autre répercussion qu’une communication à l’Académie des sciences. La découverte de ce savant, qui fut un modeste, presque un ignoré, est pourtant une grande date dans l’histoire tunisienne. Ce n’est pas le lieu de rapporter ici combien l’exploitation des phosphates dans les solitudes désertiques et brûlantes du Sud Tunisien, à 250 kilomètres des côtes, parut, il y a quinze ans environ, à beaucoup de financiers et d’industriels éminens, une entreprise chimérique et déraisonnable ; comment la concession de la mine et du chemin de fer de Gafsa, mise deux fois au concours sans résultat, trouva péniblement un soumissionnaire à la troisième tentative et ne réunit même pas le capital jugé nécessaire par ses fondateurs. Aujourd’hui, la Compagnie de Gafsa transporte sur ses rails près d’un million de tonnes de phosphates par an. Ses actions « cotent » sept fois leur valeur nominale et sa réussite décisive est volontiers citée par les socialistes unifiés comme l’une des abominations de la société capitaliste.

Sans garantie d’intérêt, ni d’autre subvention qu’une somme de 2 700 000 francs, gagée sur les redevances éventuelles de son