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Elle danse au parvis du temple et accomplit un rite superbe, le seul que le temple ait, dans sa désuétude, conservé. Elle remplace les prêtres, les fidèles, les chœurs, les ballerines et jusqu'aux joueurs de flûte, tant ses clartés aiguës, stridentes, sont analogues à une musique.

Et le temple est le diadème de la montagne.

Il a ses colonnes debout, relices par les architraves, ses colonnes fines et bien espacées ; dans les intervalles, il y a le ciel. Quand il avait sa toiture et ses murailles intérieures, il était, en ce lieu élevé, le refuge de l'ombre : elle demeurait dans la cella close ; et la lumière, qui l'avait chassée des alentours, ne l'y poursuivait pas. Maintenant, large ouvert à toutes les fantaisies aériennes, il laisse la lumière envahir la place qu'il tenait fermée ; et l'on dirait que c'est elle, joueuse pareille à la mer, qui l'a battu de ses houles et démoli, afin de mener au travers des colonnes ses farandoles de rayons.

Je montai au temple et j'y entrai ; la brise était comme de la lumière qui court et qui, au passage, vous frôle le visage et les mains.

De là-haut, quelle vue admirable et qui s'étend si loin, parfaitement nette jusqu'au cercle doré de l'horizon, que la forme de la terre, on se le figure, vous empêche seule de voir les extrêmes pays au delà des mers et des continens !

L'île déroule ses vallonnements ; et l'on découvre des paysages imprévus, des paysages de verdure. Quant aux villes et aux villages, ils sont cachés dans les plis du terrain. L'on ne voit que les cimes des arbres ; et c'est une immense émeraude ainsi taillée que les lueurs y jouent librement, claires ou foncées, luisantes ou mates, quelquefois ternes, afin qu'auprès d'elles se détache un plus vif reflet. Aux sapins se mêlent, de place en place, quelques oliviers gris et des cyprès noirs. Il se fait de jolies combinaisons de couleur ; et, sans qu'il y ait de nuages devant le soleil, il passe, de temps à autre, sur l'abondance des feuillages, de grandes ombres. Elles viennent l'on ne sait d'où. Et c'est le vent qui les amène. Elles traînent comme le manteau d'un fantôme invisible sur un gazon, et disparaissent. La verdure épaisse montre la richesse variée de ses trésors ; elle y met une fastueuse coquetterie.

Les lointains sont admirables : Athènes et son acropole finement ciselée, mince objet d'art posé dans la poussière jaune