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maison n’osaient point se risquer au temps des parties d’échecs de M. Samson… » Oui, les vieux habitués se montrent moins fidèles ; oui, l’on ne cause plus d’une manière permanente, et la permanence, la fidélité, sont les premières conditions du succès pour un salon ; celui-ci eut très longtemps ses immeubles par destination, ses pagodes, comme disait Horace Walpole, dont la présence attirait des curieux de toute sorte. Oui, la mode se retire de cet éclatant foyer, mais il a toujours ses causeurs intermittens, ses passans, et par eux des bonheurs inattendus. Il en va de même pour les salons mondains ou littéraires ; ils ont leurs éclipses et leurs résurrections. Une maîtresse de maison, qui recevait tous les soirs, est souvent forcée de ne garder plus qu’un jour par semaine : le printemps et l’été ont fait le saut par la fenêtre, l’automne frappe à la porte, les intimes illustres ont disparu… Mais il arrive parfois que cette maîtresse de maison recrute de nouvelles célébrités, et le jour hebdomadaire redevient quotidien, et les infidèles, les indifférens, les égoïstes rapprennent le chemin oublié ! Depuis quelque temps le foyer de la Comédie n’est plus à la mode ; la mode lui reviendra tôt ou tard, parce que l’essence même du génie français est de multiplier les endroits où il peut s’épanouir.


VICTOR DU BLED