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LA
VRAIE MARGUERITE DE FAUST

FRÉDÉRIQUE BRION
DANS LA LÉGENDE ET DANS LA RÉALITÉ


L’amour de Gœthe pour Frédérique Brion est un des épisodes les plus connus dans la vie sentimentale du grand homme. Épris à son aurore d’une gracieuse et simple Alsacienne, il lui donna l’immortalité au cours de ses Mémoires, et ses confidences au public laissèrent soupçonner que Frédérique pouvait bien être l’original de la coupable autant que touchante Marguerite de Faust. Dès lors, l’imagination des commentateurs se donnant carrière sur un thème aussi séduisant, la vertu de la jeune fille fut plus d’une fois mise en doute, en sorte que le récit, pourtant si bienveillant, du poète eut pour résultat d’attirer le soupçon sur la gentille amie de ses vingt ans. Nous résumerons brièvement, afin de les éclairer ensuite à la lumière de quelques documens nouveaux, les péripéties et les conséquences de cet amour illustre, car la légende à laquelle il a donné naissance nous paraît riche d’enseignemens psychologiques et capable de nous mieux éclairer sur ces obscurs conflits de traditions antagonistes qui préparent trop souvent l’incertain jugement de l’histoire[1].

  1. M. P. Decharme a écrit récemment une intéressante étude sur Gœthe et Frédérique Brion (Hachette, 1908) mais n’a pas abordé la question qui nous occupe.