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dignité, de jugement politique et fait ressortir la haute conception de la Pucelle sur la royauté pour sauvegarder l’unité française. Jeanne y supplie le Duc, « à mains jointes, » d’entendre sa requête et son conseil. « Quant au noble roi de France, dit-elle, il est prêt à faire la paix avec vous, sauf son honneur, si vous ne vous y refusez. Et je vous fais savoir de par le roi du Ciel… que vous n’y gagnerez pas de bataille… » C’était en quelque sorte prédire l’avenir, car les Bourguignons échouèrent devant Compiègne. »

2° Lettre de Jehanne aux loyaux Français, bourgeois habitans de la ville de Reims, du 6 août 1429 ; lettre datée tout militairement : « emprès Provins en Logis sur champs ou chemin de Paris[1]. »

Cette lettre, écrite dix-neuf jours après celle qui fut adressée %u Duc de Bourgogne, ne porte non plus aucune signature. La Pucelle commence à ouvrir les yeux : c’est le moment où elle exhale ses premières plaintes à ses amis de Reims qui craignent d’être abandonnés. Comme le fait remarquer M. Hanotaux, cette lettre exprime avec une netteté absolue l’opinion de Jehanne sur les trêves et sur la politique du Roi et de ses conseillers : « Preuve incomparable, dit-il, du génie divinatoire de Jeanne d’Arc ; dans ces circonstances où ses voix ne la guident pas, elle découvre mieux que les plus fins limiers la tactique décevante et les avances illusoires du Bourguignon[2]. »

3° Lettre de Jehanne : « A mes chers et bons amis les gens d’église, bourgois et habitans de la ville de Rion, » écrite de Molins le 9 novembre 1429[3]. Elle fut découverte en 1844 parmi les papiers de l’Hôtel de Ville par M. Tailhand, président à la Cour royale de Riom.

Voici la description que nous en donne M. le chanoine Cochard : « A la lettre de Jeanne adressée aux habitans de Riom (9 novembre 1429)… est appendu un cachet de cire rouge dont l’avers est détruit. Le revers seul est conservé : on y voit la marque d’un doigt et le reste d’un cheveu noir[4]qui paraît avoir été mis originairement dans la cire. Le docte, mais

  1. Archives du marquis de Maleissye.
  2. Voyez la Revue du 1er juillet 1910.
  3. Archives de la ville de Riom.
  4. Selon Philippe de Bergame, Jeanne avait les cheveux noirs : « Erat… nigro capillo. »