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lesquelles ils ont exécuté cette opération, car s’ils n’ont pas assuré le succès du présent, ils ont préparé peut-être la revanche de l’avenir.

Pendant ce temps, le ministère n’était pas demeuré inactif, et il avait manœuvré sur un autre terrain où il se sentait le maître : à la Chambre des Communes. Dans la séance du 18 novembre, M. Asquith faisait, au nom du gouvernement, une déclaration importante et habile à son point de vue. Il annonçait la dissolution pour le 28, ce qui, étant donné la brièveté du délai légal beaucoup plus court en Angleterre qu’en France, permettrait de commencer les élections le 2 décembre et de les terminer le 21, laissant ainsi les électeurs célébrer en paix les fêtes de Noël. Par là, il croyait répondre à l’une des principales objections qui avaient été dirigées contre une dissolution hâtive. En même temps, il faisait aux élémens divers qui composaient sa majorité disparate les concessions qu’il jugeait nécessaires pour maintenir leur union. Aux Irlandais, il concédait l’ajournement du budget, dont plusieurs dispositions étaient particulièrement impopulaires en Irlande. Aux membres du Labour party, il promettait, si le Cabinet libéral restait au pouvoir après les élections, de déposer un projet de loi assurant un traitement aux membres du Parlement. Cette concession importante répondait à un ardent désir des membres de ce parti, depuis qu’un arrêt fameux rendu par la Haute Cour de la Chambre des Lords, the Osborne Judgement, avait interdit aux Trade Unions d’employer leurs ressources à des dépenses électorales et en particulier au traitement des députés ouvriers. Si le principe du mandat salarié passe, comme cela paraît probable, en force de loi, la composition des futures Chambres des Communes, dont l’aspect a déjà, paraît-il, beaucoup changé, sera assurément modifiée, comme le serait celle de la Chambre des Lords par l’adoption définitive des propositions de lord Rosebery. Ainsi, à la veille des élections, les deux partis unioniste et libéral ont rivalisé de concessions à l’esprit démocratique : les Unionistes, en acceptant d’adjoindre un élément électif à la Chambre des Lords et en proposant le Referendum ; les Libéraux, en renonçant au principe de la gratuité du mandat électif. Rien ne montré mieux les progrès que, depuis dix ans, les idées nouvelles ont faits de l’autre côté de la Manche. Qu’on s’en afflige ou s’en réjouisse, le fait est indéniable. L’Angleterre, encore