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Enfin, la troisième résolution réduisait de sept à cinq ans la durée du Parlement.

Cette troisième résolution soulevait peu d’objections. Il n’en était pas de même de la seconde qui n’allait à rien moins qu’à porter une atteinte profonde à l’antique Constitution anglaise, car elle réduisait les pouvoirs de la Chambre des Lords, jusque-là égaux, sauf en matière de finance, à ceux de la Chambre des Communes, à retarder seulement de deux ans la mise en vigueur des lois adoptées par la Chambre des Communes. Son droit de Veto n’était plus qu’un Veto suspensif. Aussi donna-t-elle lieu à des débats très vifs. La durée de la discussion sur les trois résolutions ne dépassa cependant pas sept jours, du 7 au 14 avril, le ministère ayant appliqué à cette discussion le procédé de la clôture forcée, que les Anglais appellent familièrement la guillotine, qui fut inventée autrefois pour mettre fin à l’obstruction des députés irlandais, mais qu’un ministère libéral ne se fait aujourd’hui aucun scrupule d’opposer à ses adversaires conservateurs. Au cours de ces débats, M. Balfour eut beau jeu pour reprocher au premier ministre de violer ainsi la constitution anglaise, modèle de toutes les autres, et de travailler à établir, dans cette terre traditionnelle de la liberté, le gouvernement d’une seule Chambre, c’est-à-dire la plus détestable des tyrannies. Mais le parti de la majorité était pris et la résolution qui abolissait en fait le Veto des Lords fut adoptée à la majorité de 339 voix contre 237. Les deux autres résolutions furent adoptées également à une majorité considérable, tout le groupe des Irlandais et celui du Labour party ayant joint ses voix à celles des Libéraux parmi lesquels ne se produisit qu’une vingtaine de défections, car la discipline de parti qui va croissant en Angleterre laisse, — et beaucoup le regrettent, — de moins en moins d’indépendance aux membres des assemblées et établit de plus en plus ce qu’on commence à appeler, d’une expression empruntée à la langue politique des Etats-Unis, la tyrannie des caucus.


II

Ainsi le gant était jeté par la Chambre des Communes à la Chambre des Lords. Mais déjà la Chambre des Lords avait pris position et s’était mise en mesure de le relever. Ce fut un