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du Congo belge ne semble influencée en rien par la campagne menée en Angleterre, depuis plusieurs années par M. Morel. Celui-ci n’a pas bonne réputation dans l’Afrique du Sud, s’il faut en croire un curieux article de la Zuid afrikaansche Post où l’auteur compare « la campagne diffamatoire contre l’administration congolaise, à celle par laquelle fut préparée la guerre contre les républiques[1]. » Il proteste contre la cabale « du parti Jingo en Angleterre, qui ne se déclarera jamais satisfait, tant qu’en Afrique il restera un bout de territoire à annexer ou une guerre à faire. Les fournitures nécessaires pour l’armée et pour la flotte font gagner beaucoup d’argent aux négocians et fabricans anglais, tandis que les charges morales et matérielles sont endossées à l’Afrique. »

La conclusion ne devrait-elle point être que l’Afrique du Sud, se dégageant de l’influence anti-congolaise, va s’efforcer de nouer les relations les plus amicales avec sa voisine du Nord, en évitant scrupuleusement toute intrusion indiscrète ? Pas du tout. « Qu’on n’oublie point que si la Rhodésie doit faire bientôt partie d’une confédération Sud-Africaine, le Congo, considéré actuellement encore comme un pays lointain et étranger, deviendra pour elle un État limitrophe où la moitié de la population parlera le hollandais, où des centaines d’Afrikanders s’établiront et où l’Afrique du Sud aura à sauvegarder de graves intérêts sociaux et commerciaux… Dès que la Rhodésie sera unie politiquement, socialement et commercialement à l’Afrique du Sud, et qu’elle sera reliée au Congo par le chemin de fer, — ce qui arrivera bientôt, — le Congo sera attiré dans le rayon d’influence des Afrikanders. » Qu’est-ce à dire et comment expliquer cette contradiction ? Il n’y a de contradiction que dans les apparences, et la suite de l’article nous en fournit la preuve : « La question de savoir, poursuit l’auteur, si le parti Jingo anglais donnera son adhésion à cette solution et ne cherchera point à diviser le Congo d’une manière plus avantageuse pour l’Angleterre, touche aux plus graves intérêts d’avenir de l’Afrique du Sud. Quelle que soit la solution proposée, il faut que l’Afrique du Sud puisse faire entendre sa voix au chapitre. »

Quelle que soit la solution proposée, il faut que l’Afrique du Sud puisse faire entendre sa voix au chapitre : dans ces mots,

  1. Numéro du 22 octobre 1908.