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contre elle-même pour se débarrasser de ce qui le gêne, un ministre que n’anime aucune passion confessionnelle profonde, et qui ne songe qu’à l’Etat, aspire à faire l’économie d’un schisme entre citoyens, et à supprimer doucement, au lieu de les provoquer, les énergies dont il a pris ombrage. Ainsi fera tout d’abord Bismarck ; un prochain article, où nous étudierons ce que pensaient, et ce que redoutaient, et ce que voulaient, au début de 1871, les catholiques d’Allemagne, nous montrera le chancelier déployant de nouveau ses caresses et ses menaces pour obtenir de la papauté un service politique.

Puisque Pie IX, à la date du 6 mars, répondant à la lettre par laquelle Guillaume lui avait annoncé la fondation de l’Empire, témoignait sa grande joie et exprimait l’espoir que cet événement serait salutaire, non seulement pour l’Allemagne, mais pour toute l’Europe, Bismarck, s’emparant de ces mots de courtoisie, allait tenter de les interpréter comme la préface d’une demi-alliance entre la tiare et la couronne des Hohenzollern.

Ainsi qu’il avait espéré le concours de Pie IX en France, pour abréger la guerre, et le concours de Pie IX en Bavière, pour achever d’édifier l’Empire, il invoquerait son intervention, à Berlin, contre le jeune parti du Centre. Une fois encore, — ce serait la dernière, — avant de chicaner et d’attaquer l’ascendant de Pie IX, il essaierait de s’en servir et de l’exploiter.


GEORGES GOYAU.