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que, dans ces questions difficiles, ce n’est pas par des considérations de sentiment ni même par des théories qu’il faut se laisser diriger, mais elles ne sont pas sans utilité, car elles portent l’attention tantôt sur une question, tantôt sur une autre. De la constatation de faits douloureux, qui étaient demeurés inconnus, de la contradiction même des remèdes qu’on propose peuvent surgir certaines idées nouvelles, et ces idées contribuent au lent progrès qui, à travers les siècles, et malgré de trop fréquens retours en arrière, récompense à la longue la marche pénible des sociétés humaines. C’est pourquoi nous voudrions entretenir aujourd’hui les lecteurs de la Revue de « celles qui travaillent à domicile. »


I

Nombreuses sont, depuis quelques années, les publications qui ont pour sujet le travail féminin et en particulier le travail à domicile. Sans remonter jusqu’à l’ouvrage, déjà ancien, mais classique en quelque sorte de M. Paul Leroy-Beaulieu sur le travail des femmes, ni à ceux, plus récens, de M. du Maroussem sur l’Industrie du vêtement ou de M. Charles Benoist sur l’Ouvrière de l’aiguille, on peut citer la Femme dans l’industrie, par M. Gonnard ; le Travail à bon marché, par l’abbé Meny, le Salaire des femmes, par M. Poisson, le Sweating System, par M. Cotelle ; l’Ouvrière de l’aiguille à Toulouse, par M. Espinasse. Il serait facile d’allonger la liste. Mais de toutes ces publications la plus récente, la plus complète, et partant la plus intéressante est l’Enquête sur le travail à domicile dans l’Industrie de la lingerie, entreprise par l’Office du travail. Cette enquête, commencée il y a quatre ans, donnera lieu à la publication de trois volumes : le premier, consacré à l’industrie de la lingerie dans Paris, a paru cette année. Les deux autres paraîtront successivement. Conduite avec beaucoup de méthode et d’ingéniosité, cette enquête fait grand honneur à l’Office du travail, à son directeur, M. Fontaine, et à ses deux enquêteurs parisiens, MM. Georges et Maurice Alfassa. Le nombre des ouvrières interrogées par eux s’est élevé à 540, celui des entrepreneuses à 29 ; celui des patrons ou fabricans à 18. Les budgets de 66 familles ont été étudiés avec minutie, suivant l’excellente méthode de l’école de Le Play. Tous ces renseignemens forment un gros volume de