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trop souffert. D’ailleurs, ma vie est bien précaire, et vous n’avez ni parens ni personne. J’espère que je me suis fait une raison là-dessus. Je vous prie en grâce de brûler de suite la lettre que je vous ai écrite en parlant. M. Mohl m’a dit que vous étiez à Passy. C’est pour cela que vous n’avez pas reçu mes lettres, sans doute ; il m’aurait fait bien plaisir de recevoir des lettres de vous. Malgré cela, il me semble qu’ayant été si mal, vous auriez bien pu m’écrire sans en avoir de moi. Je ne vous fais point de reproches, cher ami, de ne point l’avoir fait, je m’en afflige. Il me dit que vous travaillez beaucoup, et je tâche de me consoler en pensant à cela. Que ferais-je sans lui !...


Mary Clarke à Claude Fauriel.

Je suis bien affligée, cher ami, de ne pas avoir un seul mot de vous. Je ne sais si mes lettres ne vous sont pas parvenues, ou si je vous ai offensé par quelque chose dans ces lettres. Croyez bien que c’est involontaire, et pardonnez-le-moi. J’étais très fatiguée en écrivant la première, car je voulais vous dire, mais je n’ai pas pu, que j’accepte tout ce que j’ai souffert comme juste et mérité par mes anciens torts. J’aurais dû mieux vous comprendre et croire en vous, mais j’avais été gâtée, et mon impétuosité naturelle est sans bornes. Depuis ma maladie, j’ai trouvé une extrême douceur en pensant à des choses que vous m’avez dites cet hiver. Pardonnez-moi d’avoir été si peu reconnaissante alors : j’ai eu pendant ces quatre mois comme un fer chaud dans la poitrine. C’était sans répit : tout moi était absorbé. Pensez combien la douleur rend égoïste, et injuste, que nous sommes de pauvres créatures bien faibles, et moi surtout. M. Mohl m’a écrit que vous aviez été inquiet de moi pendant ma maladie. Je vous en remercie, cher ami, du fond de mon âme. Je voudrais avoir au moins quelques mots de vous. Je voudrais savoir si vous êtes heureux el si vous me pardonnez. Il m’a dit que vous espériez avoir fini pour l’hiver et publier une partie de votre livre. J’ai traduit trois de vos leçons et j’en ai lu deux à miss Watts qui en a été ravie malgré ma traduction : je craignais qu’elle ne fût inintelligible. Cela fait que je pourrai peut-être traduire votre livre. Que puis-je faire pour vous faire plaisir ? Dites-le-moi ! Y a-t-il quelque chose dans le monde dont je sois capable qui puisse expier mes torts envers