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parties d’un autoplaneur importe plus que leur légèreté de même la sûreté de marche d’un moteur, car si elle est nécessaire pour garantir une durée suffisante au voyage, elle l’est encore pour permettre au pilote de naviguer à une altitude convenable.

Jusqu’à présent, en effet, les aviateurs n’ont pas quitté le voisinage du sol dont les nombreuses aspérités troublent l’air environnant et y créent une infinité de remous, qui se font parfois sentir jusqu’à d’assez grandes hauteurs, de même que les saillies rocheuses du lit d’un torrent y suscitent des bouillonnemens et des tourbillons. Ils se trouvent, dans ces conditions, exposés à des dangers qu’ils éviteraient en manœuvrant à une hauteur assez grande, et se mettent ainsi, comme le leur a fait remarquer maintes fois le commandant Renard, dans la situation d’un marin qui ne s’éloignerait pas des parages d’Ouessant ou de la pointe du Raz. À 3 ou 400 mètres du sol, il en serait tout autrement ; puis, qu’un défaut momentané de stabilité survienne, ils auraient le temps de conjurer toute catastrophe, en manœuvrant les gouvernails ; mais en cas de descente forcée, peut-on prévoir où la glissade qui en résultera permettra d’atterrir ? Plus que jamais donc l’endurance du moteur s’impose. Quelques aviateurs, que les pannes des moteurs à essence découragent, parlent de revenir au moteur à vapeur (vapeur surchauffée, bien entendu) à turbines, d’une marche plus sûre et plus souple. Mais on ne voit pas pourquoi le moteur à essence, brutal, mais aussi plus léger, devrait, en fin de compte, être écarté : il nous semble qu’on aurait toutes les garanties désirables en installant à bord, comme sur les dirigeables, plusieurs moteurs au lieu d’un ; puis, en diminuant le nombre des cylindres, en doublant l’allumage et, enfin, en distillant l’essence avec assez de soin pour en faire un composé bien défini, dont la puissance d’explosion serait toujours la même. Ajouterons-nous qu’il serait indispensable, aussi, de rendre le moteur silencieux, si, à la guerre, on voulait employer l’aéroplane à des reconnaissances nocturnes ?

Quoi qu’il en soit, le moteur ainsi guéri de sa faiblesse de cœur, il faudrait songer encore à l’amélioration de ses « poumons ; » il est, en effet, plus que la vulgaire machine à vapeur, sujet au mal des montagnes : à partir de 2 000 mètres, l’expérience montre (et le fait s’explique aisément) que l’oxygène manque à l’essence, que la respiration du moteur se ralentit et tend à s’arrêter, de sorte qu’à l’heure actuelle il serait à peu près