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revenir à terre suivant une ligne oblique, dont on modère la pente à l’aide du gouvernail de profondeur. Cette manœuvre, bien exécutée, est sans danger aucun : Wilbur Wright, en arrêtant son moteur à 20 mètres de haut, a pu, en relevant convenablement le gouvernail d’altitude, atterrir doucement après une glissade de 60 mètres environ, ce qui démontre les qualités de bon planeur, au point de vue de l’équilibre, de son volateur, qualités dont personne n’a, d’ailleurs jamais douté. Bien entendu, les sections des gouvernails d’altitude et de direction doivent, elles aussi, être pisciformes ; l’un et l’autre, comme dans les navires, comme dans les dirigeables, doivent être fixés le plus loin possible du centre de gravité de l’appareil, de façon à porter au maximum la longueur du bras de levier sur lequel agit la résistance que l’air leur oppose.

Mais assez de théorie... Nous connaissons, maintenant, les organes essentiels d’un aéroplane : le corps (la nef) ; le cœur (le moteur), cœur malheureusement encore bien faible, trop sujet à cesser de battre, mais que la Science, n’en doutons point, saura rendre de plus en plus robuste ; les nerfs et les muscles (les leviers qui mettent en jeu les gouvernails, l’hélice) ; les ailes (les surfaces portantes, les deux gouvernails) ; la tête ou, mieux, le cerveau (l’aviateur). Il est temps de passer aux faits.

Cependant, deux observations encore :

1° Lorsque l’aéroplane, cessant de progresser suivant son axe, vient à décrire une courbe, une nouvelle force intervient dans son équilibre, la force centrifuge, proportionnelle au carré de la vitesse et inversement proportionnelle au rayon de la courbe décrite, qui tend à le rejeter en dehors de sa nouvelle trajectoire. Tous les véhicules, au moment d’un « virage, » y sont soumis, et ils ne réussissent à tourner que si quelque chose vient s’opposer à cette force. Pour les navires, pour les dirigeables, c’est le frottement de l’eau ou de l’air contre leur énorme surface latérale qui se charge de l’annihiler, ou à peu près ; il n’en saurait être ainsi d’un aéroplane, tel que le Wright, dont la résistance transversale est extrêmement faible : quand il vire, il tend toujours à être chassé hors de la trajectoire qu’il voudrait décrire, à moins qu’on ne trouve le moyen de l’incliner d’un angle tel que sa composante de soulèvement soit dirigée non plus suivant la verticale, mais suivant la résultante du poids de l’appareil et de la force centrifuge. Pour un volateur quelconque,