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la confiscation provisoire de cet opuscule, et l’impressionnabilité toujours vibrante de son humeur primesautière l’amenèrent à se compromettre un peu plus que de raison pour l’écrit de Quarella ; car cet écrit militait contre l’infaillibilité même, et l’évêque de Mayence ne contestait que l’opportunité. Plus tard, à plusieurs reprises, il déclarera n’avoir jamais pris à son compte les idées de Quarella, et les avoir propagées, non comme une expression de sa pensée, mais comme un document digne d’attention. Ces distinctions très plausibles n’empêcheront pas les ennemis de Ketteler d’exploiter l’incident pour affirmer qu’à certaines époques du concile Ketteler, d’anti-opportuniste, était devenu anti-infaillibiliste. Dans l’émotion des polémiques, l’accent de sa parole dépassait parfois la portée de sa pensée. Alors le spectateur aux aguets, prompt à interpréter une saillie d’humeur comme une manifestation d’opinion, faisait de l’évêque de Mayence, sans plus de nuances, le père adoptif d’une brochure dans laquelle Ketteler, plus rassis, cherchait en vain ses propres pensées, et ne les trouvait plus.

L’effet des quatre opuscules fut singulièrement atténué par la série d’Observations critiques que publia contre eux le Jésuite Wilmers ; mais Arnim gardait encore quelque espoir. Bien que les évêques allemands ne lui demandassent rien, il se croyait toujours à la veille du jour où, malgré eux, il pourrait les servir. Lorsque fut remis au Pape, le 22 avril, le memorandum définitif dans lequel Daru réclamait respect pour les droits et les libertés de la société civile, Arnim demanda, d’urgence, si Berlin voulait appuyer les Tuileries. — Oui, répondit le secrétaire d’État Thile ; mais quant à une note écrite de votre part, il faut auparavant vous assurer de l’impression qu’elle ferait sur les évêques allemands. — Cette demi-permission suffisait au ministre de Prusse sans retard, dès le 23 avril, il prévint Antonelli que les intentions prêtées au concile nuiraient à la paix religieuse du royaume. « L’assemblée, continuait-il, troublerait les consciences catholiques si elle procédait, malgré la plupart des évêques d’Allemagne, à la proclamation de certains décrets qui, en introduisant sous forme de définitions dogmatiques des modifications profondes dans la délimitation de l’autorité attribuée à chaque degré de la hiérarchie, ne pourraient manquer d’altérer en même temps la position réciproque des pouvoirs civil et ecclésiastique. » Daru, dans son memorandum, ne faisait