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rien à voir avec de pareilles industries et rien à craindre de notre législation. Elles portent sur l’établissement, au grand soleil de France, d’un certain nombre d’agens officiels du Canada, accrédités auprès de notre gouvernement et qui, sans exercer aucune pression déloyale, mais par des conférences, des conversations des correspondances, des articles de journaux, des expositions de produits, des publications de correspondances, et des voyages en France de colons français, feront connaître le Canada tel qu’il est, avec ses avantages, son étendue, sa liberté, son climat froid mais sain, ses richesses, qui ne se ramassent pas rien qu’à se baisser, qui s’achètent au contraire par un travail acharné comme en France, mais qui rémunèrent mieux leur homme et lui assurent une belle aisance terrienne au bout de quelques années.

Il ne s’agit nullement de dépeupler et de vider notre beau pays, mais de canaliser dans la direction du Saint-Laurent les minces courans d’émigration qui s’en échappent par différentes ouvertures pour se disséminer et se perdre de côtés différons. A tous ceux qui se sentent, pour un motif ou pour un autre, trop à l’étroit sur notre sol et qui ne veulent point tenter l’exode dans nos propres colonies, — où ne les poussent d’ailleurs, la plupart du temps, ni la salubrité du climat, ni les sociétés de colonisation persuadées qu’elle doit se faire surtout par l’indigène[1], — à tous ceux-là il faut montrer et remontrer le Canada, le pays le plus français qui soit au monde en dehors de la France. Ne sont-ce pas les descendans de nos propres aïeux, qui nous y accueilleront, qui nous entoureront, professant notre langue, notre foi, notre affabilité, notre gaieté, nos chansons, nos traditions, nos mœurs, et nous donnant un peu l’illusion que nous retrouvons dans une vie nouvelle un coin de la vieille et chère France ?

Qui sait même si une pareille vulgarisation ne parviendrait pas à diminuer peu à peu l’égoïsme général qui restreint de plus en plus la natalité française ? si, chaque famille sachant avec certitude qu’au bout d’une ligne de paquebots se trouvent du travail assuré et de la terre à posséder pour quiconque veut seulement la cultiver, les parens ne seraient pas moins inquiets à la perspective de promouvoir de nouvelles existences ? Chaque famille nombreuse compterait un ou deux « Canadiens » désignés à

  1. Conclusion d’une récente discussion du comité Dupleix.