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sont interdits, comme des « œuvres de mensonge, » des pièges diaboliques ; et ainsi, d’année en année, il grandit sans lumière et sans air, nourri seulement d’effrayans ouvrages tels que les Pensées sur l’Apocalypse ou les Horæ apocalypticæ ; après quoi vient un jour où son besoin naturel de respirer librement le force enfin à secouer, de ses épaules, l’intolérable fardeau du calvinisme familial, et, en même temps, à se dépouiller pour toujours de toute croyance religieuse, à tarir irrémédiablement dans son cœur toute source d’émotion consolante et d’immortel espoir.

En vérité, l’auteur nous assure que ses parens ont été les derniers types d’une espèce religieuse aujourd’hui éteinte, et que, jusque dans les familles les plus fidèles à la forme primitive et surannée du puritanisme, les enfans reçoivent désormais une éducation toute différente de celle qu’il a reçue. Mais son livre, en dépit même de la tendance nettement agnostique de ses conclusions, n’en exercera pas moins une action bienfaisante dans toutes les classes des lecteurs chrétiens, en leur apprenant, par un exemple le plus expressif du monde, combien la connaissance de la bonté de Dieu est toujours préférable à celle de sa justice. Si les parens de l’écrivain anonyme avaient été plus pénétrés du sentiment de cette bonté, ils auraient accoutumé leur fils à la reconnaître, et à en recueillir, autour de lui, les mille fruits divers ; ils auraient cultivé en lui la limpide gaîté, qui est au premier rang des vertus chrétiennes ; et leur enfant, devenu homme, aurait pu développer librement sa personnalité sans être forcé de rompre le lien sacré qui l’attachait à sa race. J’irai plus loin : si ces parens avaient eu plus de foi dans la bonté de Dieu que dans sa justice, leur immense amour pour leur enfant aurait laissé à celui-ci un souvenir plus tendre, et l’aurait empêché, même converti à d’autres croyances, de nous dessiner d’eux l’impitoyable portrait qui remplit tout son livre.


III

Il me resterait à parler, maintenant, d’un certain nombre d’ouvrages qui, sans avoir la portée artistique ou philosophique de ceux que j’ai déjà signalés, se recommandent par l’agrément de leurs sujets ou de leur mise en œuvre ; mais la place me