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Et maintenant, les fâcheux qui prévoyaient que ces diminutions seraient passagères, ceux qui annonçaient qu’on ne tarderait pas à retrouver, bon gré mal gré, à l’état d’indiscutables délinquans, les hommes auxquels on avait donné l’illusion de l’impunité, se sont-ils trompés ? Se sont-ils trompés en pensant de plus que la politique de persécution, que les campagnes de calomnies et de chantage contre les établissemens hospitaliers, que les atteintes redoublées à la liberté de la charité allaient compromettre le peu de bien dont l’apparition si récente avait donné une lueur d’espérance ? La statistique qui vient de paraître et qui donne une récapitulation des années allant de 1901 à 1905, prouve clairement le contraire : car les quatre dernières années, mais surtout la quatrième, nous montrent la reprise de l’aggravation et une reprise qui promet d’être fortement soutenue.

Dans la colonne des infractions qualifiées légalement de crimes, on était habitué à suivre une diminution lente et persistante, provenant du fait bien connu de la « correctionnalisation » d’un grand nombre d’attentats. Cependant, que voyons-nous présentement dans le mouvement des accusés ? Dans les dernières années, nous voyons les crimes contre les personnes aller successivement de 1 037 à 1 103 et à 1216. Si nous décomposons ce total, nous voyons monter les assassinats de 140 à 169 ; les meurtres, de 163 à 186, à 222, à 230, à 274 ; les parricides, de 9 à 12 ; les coups et blessures ayant entraîné la mort ? de 145 à 171 ; les viols sur les adultes, de 58 à 62.

Les crimes contre les propriétés déférés au jury[1] étaient en 1902 au nombre de 787. Ils sont en 1905 au nombre de 1 020. Les vols et abus de confiance qualifiés ont progressé de 640 à 654, à 669, à 690. Les incendies ont été de 120 à 141. L’esprit d’association de ces malfaiteurs est venu encore aggraver le péril. Si en 1900 on comptait pour 100 affaires 126 accusés, en 1905 on en compte 147.

Parmi les symptômes le mieux faits pour incliner un instant vers un optimisme relatif, nous avons signalé la baisse des suicides. S’ils avaient encore augmenté de 1896 à 1899, ils avaient diminué ensuite avec lenteur, mais avec régularité, jusqu’en 1902. A partir de là, ils se relèvent, et en 1903, nous en constatons 614 de plus, soit 9 330 au lieu de 8 716.

  1. Et combien ne peuvent pas lui être déférés, quoique certains !