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falaises rosâtres étaient tristes et accablés, pilant en mesure, avec une lenteur découragée à enfoncer le temps, les macadams des terrassemens, immobiles et stupides à vous regarder passer comme dans l’attente résignée de coups, autant les travaux communaux s’exécutent avec vivacité sous la direction des administrateurs paternels. Entre tous, nous nous rappellerons l’aspect qu’offrait la route en construction de Betafo à Antsirabé. Dans la pure lumière de trois heures qui rendait toute leur plénitude aux formes des montagnes et en face même de leurs petites maisons blanches aux enclos gris, hommes, femmes, enfans, par familles, travaillaient avec souplesse et quelque abandon, s’arrêtant le visage mutin ou attentif selon de jolies poses curieuses dans des pagnes où des cordons moulaient le corps, puis courant se rejoindre les uns les autres en un flottement gracieux : fillettes portant les paniers de terre par longues théories, garçons charriant les pierres ou adultes piétinant la boue sur un rythme mâle de mélopée, avec des visages parfois durs, mais francs.


III. — L’ADMINISTRATION INDIGENE ET LE PERSONNEL FRANÇAIS

« L’administration doit être un protectorat, » telle fut la formule-programme du général Galliéni. Elle ne lui était pas seulement imposée par les faits historiques, l’évolution de notre conquête, la patiente Liquidation dont on le chargeait de l’administration du résident Laroche et du régime du protectorat, mais par le système général de la colonisation française, tel qu’il a été conçu dans les bureaux composites du pavillon de Flore qui, recrutés à la hâte à la Marine, se sont mis à l’école diplomatique du Quai d’Orsay. Des fonctionnaires malgaches devaient donc jouer un rôle assez important, servant d’intermédiaires entre les gouvernans français et les contribuables, et ce régime ne devait point être un accommodement provisoire, commandé par le besoin de correspondre au moyen de sortes d’interprètes avec ces derniers jusqu’à ce qu’ils sussent tous le français, but aisé à atteindre, mais au contraire un système définitif. La pensée foncière du général Galliéni était de s’en servir comme d’un mode d’éducation progressive qui adapterait nos sujets et particulièrement les Hovas à la civilisation moderne en leur permettant de se passer de plus en plus de fonctionnaires européens : au lieu de