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REVUE LITTÉRAIRE

ROMANS DE FEMMES[1]

Il a paru, depuis quelque temps, un nombre considérable de romans français écrits par des dames, et plusieurs se sont imposés à l’attention. Ce phénomène n’a pas laissé de causer une certaine surprise, et on s’est ému entre littérateurs. Les romanciers se sont montrés inquiets de cette concurrence qu’ils n’avaient pas prévue ; les critiques ont noté avec soin l’événement. Ni les uns ni les autres n’ont réfléchi que cette prétendue nouveauté est aussi vieille que l’histoire elle-même du roman. De tout temps en effet on a compté parmi les faiseurs de romans presque autant de femmes que d’hommes. Laissons de côté celles dont les noms sont devenus fameux par la gloire du talent ou par l’illustration du ridicule ; voici pour les premières années du XVIIIe siècle : Mlle de la Force, Mmes de Tencin, de Murat, d’Aulnoy ; pour les premières années du XIXe : Mmes Cottin, Mmes de Souza, de Krudener, de Duras. Il suffit de feuilleter les répertoires pour constater qu’il n’y a pas d’année qui n’ait apporté son contingent de romans féminins, adoptés pour un temps par le succès et par la mode.

Rien de moins surprenant, quand on y songe, et il suffit de remarquer que le genre est, par sa nature même, tout acquis à l’influence féminine. Les femmes sont grandes lectrices de romans, et, quand

  1. Marcelle Tinayre : L’Oiseau d’Orage ; Hellé ; La Maison du Péché ; La Vie Amoureuse de François Barbazanges ; La Rebelle. — Gérard d’Houville : L’Inconstante ; Esclave. — Comtesse Mathieu de Noailles : La nouvelle Espérance ; Le Visage Emerveillé ; La Domination, chez Calmann-Lévy.