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marchands d’Allemagne ; en attendant, le duché d’Alençon demeurerait hypothèque de la somme du capital augmentée de l’intérêt et néanmoins, dès le premier paiement effectué, le duc abandonnerait à la reine la jouissance des domaines normands. Afin de faciliter ces négociations, Marie de Médicis avait écrit une lettre fort aimable à l’intendant des affaires du duc de Wurtemberg en Allemagne, M, de Beninghausen, en l’accompagnant d’une belle chaîne d’or et d’une médaille « pour marque et souvenir de ma bienveillance ». Le prince allemand accéda. Ce fut alors avec les banquiers que les difficultés commencèrent. MM. Sainctot et Lumagne n’avaient pas grande confiance : ils posèrent d’abord des conditions léonines.

Finalement un contrat fut passé avec eux le 4 septembre 1612, aux termes duquel la reine leur devrait non pas 600 000 livres, somme réelle à solder au duc, mais 721 000 livres, et jusqu’au règlement, elle paierait aux banquiers un intérêt annuel, pour cette somme de 700 livres 1 Les banquiers invoquaient bien qu’ils avaient des frais ci de change et de rechange ; » en réalité l’opération était très onéreuse. Mais les habitudes de Marie de Médicis, le désordre de ses finances, l’impossibilité à obtenir d’elle prompte satisfaction du fait des inextricables oppositions des cours et bureaux les contraignaient à prendre des précautions. Exactement à la Saint-Rémy 1613, ils effectuèrent à Francfort le versement du premier tiers dû au duc, 200 000 livres ; aux échéances suivantes ils payèrent le tout. Cinq ans après ils n’étaient pas remboursés de leurs avances. Ils réclamèrent 10 000 livres d’intérêt ; on les leur refusa. Ils insistèrent pour rentrer dans leur capital. Parlement, chambre des comptes, cour des aides, tout se coalisa afin de repousser la dépense. Ce fut Louis XIII, en 1618, après la fin de la régence de sa mère et le départ de celle-ci de Paris, qui devait intervenir autoritairement et liquider l’affaire dont on ne put venir à bout qu’au moyen de lettres de jussion répétées et menaçantes.


Douaire et propriétés réunis, Marie de Médicis arriva à se constituer un fonds de revenus double de celui dont elle disposait au temps d’Henri IV. Il s’était bien trouvé, expérience faite, que les terres du douaire ne rapportaient pas, à beaucoup près, les 150 000 livres promises. Nous avons dit que le duché de Bourbonnais ne produisait que 4 300 livres ; les revenus du duché