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PENSÉES MUSICALES DANS LA SIXTINE

On pourrait écrire un beau livre sur ce sujet et sous ce titre : Les harmonies de Rome. Rome a ses harmonies, comme son parfum. Les unes, qui se forment par analogie ou par identité, ressemblent à des unissons. Les autres, — ce ne sont pas les moins nombreuses, — naissent au contraire d’antithèses quelquefois grandioses, quelquefois délicates, et qui ne manquent jamais de se résoudre en sublimes ou subtils accords.

La plus haute, en même temps que la plus profonde de ces harmonies, celle qui les domine, si peut-être même elle ne les résume toutes ; celle où vibre pour ainsi dire la beauté tout entière de Rome, où parlent toutes ses voix, c’est la rencontre, ou mieux le contact du christianisme avec l’antiquité. A chaque instant, à chaque pas, « dans les murs, hors des murs, » on sait combien de signes le révèlent. Les archéologues ne sont pas encore arrivés à le rompre partout, pour le plus grand bien de la science, et pour le plus grand mal de la pensée ou de la rêverie. Ils ont « désaffecté » le Colisée et dépouillé de sa dernière croix, avant de le fouiller jusqu’aux entrailles, le sol qui but le sang des martyrs. Mais leur curiosité, parfois plus heureuse, a découvert un des premiers sanctuaires chrétiens, Santa Maria Antica, blotti contre le palais des Césars. Les colonnes d’Antonin et de Faustine servent — jusques à quand ? — de portique à l’église de San Lorenzo in Miranda, et deux autres colonnes, de porphyre antique, s’élèvent devant l’humble rotonde de briques dédiée aux saints Cosme et Damien.

Ailleurs encore qu’au milieu des augustes débris du Forum et du Palatin, de plus modestes témoignages trahissent la ville,