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attaquent le vieux Niewchouang. Soixante Japonais s’enferment dans une maison et refusent de se rendre. On les laisse. On s’empare de plusieurs convois qui sont aussitôt brûlés. Les Japonais, ou leurs agens chinois, incendiaient les villages tout le long de la route suivie par les colonnes russes, de sorte que leur itinéraire était tracé le jour par de grandes colonnes de fumée et la nuit par la lueur des hameaux qui brûlaient. La nuit du 12 fut passée dans des villages à 30 kilomètres à l’Est de Yinkéou. Pendant ce temps, les Cosaques du Caucase détruisaient près de 500 mètres de voie ferrée au Nord de Haycheng. Les dragons faisaient sauter partiellement le pont de Tachikieo et coupaient le télégraphe. Le 12, la cavalerie marche sur la station de Yinkéou, incendie les magasins voisins et à quatre heures attaque la station défendue par un millier de Japonais, dont une grande partie est arrivée au moment même, par un train qui avait réussi à passer. Les six batteries russes sont en action. Les Japonais n’ont pas d’artillerie, mais ils sont retranchés. Les bâtimens près de la gare prennent feu ; néanmoins l’attaque, continuée jusqu’à la nuit, échoue, — parce que les cavaliers n’ont pas de baïonnettes, dit le rapport. Le général Mistchenko se retire en bon ordre emmenant ses blessés. Mais une force japonaise considérable était en même temps envoyée de Haytcheng pour couper la retraite. Le 13, le général russe fait une pointe vers le Nord, comme s’il avait l’intention de traverser de nouveau le Taïtsou. Les Japonais le suivent. Le 14, à la pointe du jour, l’artillerie russe les canonne, tandis que la cavalerie reprend la direction du Nord. Le 15, elle est en sûreté derrière les avant-postes de l’armée.

Voici donc un raid organisé et conduit avec autant d’habileté que d’énergie et sans résultat appréciable. Dans l’état actuel de la cavalerie européenne, aucune autre n’aurait pu mieux faire. On ne saurait imputer son peu de réussite à un manque de vigueur, mais uniquement au fait que cette cavalerie manquait de l’arme indispensable : l’obusier, ou mortier léger, qui seul peut rendre intenable un village et briser rapidement l'obstacle rencontré. Une artillerie de petit calibre, quelque rapide que soit son tir, très puissante contre des troupes à découvert, est incapable de réduire des ouvrages de campagne. Les trente-six canons, mis en batterie devant la station de Yinkéou, n’avaient pas d’artillerie en face d’eux ; ils étaient dans la plénitude de