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ment, est une créature vivante, une princesse qu’un sorcier a changée en pierre : et, dans la nuit de la pleine lune, le prince aura le droit de ranimer cette princesse, s’il parvient à la reconnaître parmi les trois statues ; mais s’il se trompe, c’est lui qui, aussitôt, sera changé en pierre. Ce qu’apprenant, Angeletta essaie d’abord de détourner le jeune homme du projet qu’il a fait de retourner dans ce palais, la nuit de la pleine lune ; mais il s’obstine, et la pauvre Angeletta va trouver le sorcier et lui offre d’être elle-même changée en pierre, pour que le prince qu’elle aime conquière sa princesse. « Réfléchis bien encore jusqu’à la nuit prochaine ! lui dit le sorcier. Et si tu persistes dans ta folle intention, attends-moi, au lever de la lune, auprès du palais où sont les trois statues ! »

La nuit suivante, qui est celle où le jeune prince doit faire son choix, Angeletta attend le sorcier, derrière le palais. Un peu pourilui annoncer qu’elle est là, un peu pour se consoler de toute la tristesse qui, de nouveau, lui emplit le cœur, elle chante : et bientôt sa merveilleuse chanson pénètre dans la salle où le prince, hésitant et effrayé, s’apprête à choisir entre les trois statues ; et bientôt l’une de celles-ci, ressuscitée par ce chant qui vient droit du ciel, se réveille, rouvre les yeux ; et le prince la reçoit tendrement dans ses bras. Et Angeletta ? demandera-t-on. L’auteur du conte nous affirme que les deux amoureux, dans l’ivresse de leur bonheur, ont bien cru la voir remontant au ciel, avec des ailes neuves : mais peut-être se sont-ils trompés, et la pauvre enfant dort-elle encore, aujourd’hui, dans la froide salle du palais enchanté, où il n’y a plus guère de chance, hélas ! que jamais aucun fils de roi s’expose à être changé en pierre pour essayer de la déUvrer.


Ces deux contes, et vingt-huit autres qui les accompagnent dans un gros livre tout rempli d’images, sont le résultat d’un concours organisé, le printemps passé, par un journal populaire de Berlin. Les directeurs de ce journal avaient promis de publier les trente meilleurs contes qu’on leur enverrait, et de donner même des prix, en argent, aux trois meilleurs d’entre eux : mais à la condition que les auteurs des contes ne fussent point des écrivains de métier, ou tout au moins des écrivains ayant eu, déjà, des œuvres imprimées. Au terme fixé, 4 025 contes sont arrivés, de tous les coins de l’Allemagne : et un membre du jury nous apprend qu’il y en avait une bonne centaine qui auraient mérité d’être publiés.

Le premier prix a été donaé à un ouvrier, M. Henri Traulsen, de