Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 30.djvu/152

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LE MANUSCRIT
DES
BUCOLIQUES[1]


Mais telle qu’à sa mort, pour la dernière fois
Un beau cygne soupire, et de sa douce voix,
De sa voix qui bientôt lui doit être ravie,
Chante, avant de partir, ses adieux à la vie :
Ainsi, les yeux remplis de langueur et de mort,
Pâle, elle ouvrit sa bouche en un dernier effort…


Lorsque, dans la salle des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale, j’ouvris au hasard le volume des Bucoliques d’André Chénier, et que je lus en haut d’un feuillet de papier bleuâtre, écrits d’une encre pâlie par le temps, les premiers vers, si

  1. Les pages que l’on va lire, et qui sont les dernières qu’ait écrites notre regretté collaborateur, José-Maria de Heredia, doivent servir de Préface à une somptueuse édition des Bucoliques d’André Chénier, admirablement imprimée, et enrichie de douze lithographies d’un autre mort illustre, le peintre Fantin-Latour. Le volume, de format in-4o, paraîtra prochainement à la Maison du Livre, chez M. Charles Meunier ; il n’en sera tiré qu’un petit nombre d’exemplaires ; et le produit en est destiné à faire les frais d’un monument à la mémoire d’André Chénier ; M. Denys Puech en sera l’auteur.
    Nous n’avons pas d’ailleurs à insister sur l’intérêt du texte des Bucoliques, rétabli d’après les manuscrits, disposé dans un ordre nouveau, revu dans les moindres détails par le poète des Trophées ; et c’est à lui que nous laissons le soin de le dire lui-même dans ces pages où il a mis toute sa vibrante admiration pour le génie savant, subtil, et compliqué d’André Chénier.