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passage, la pèlent ou même lui tranchent doucement de longs copeaux de chair. C’est ainsi que s’obtiennent, sur la pâte à demi molle, les gorges, les filets ou les moulures saillantes, avec une netteté supérieure à tout autre procédé.

Seulement ce procédé-là est cher et, de plus en plus, la main du potier disparaît devant le moule. Avec un modèle on faisait un moule autrefois ; on en fait cent aujourd’hui et de ces cent moules on tire des milliers d’exemplaires du même objet, tous pareils, suivant l’objectif visé par nos contemporains de la multiplication indéfinie des choses. Les pièces que l’on ne pouvait tourner parce qu’elles n’étaient pas rondes, et qu’il fallait pétrir à la main, sont maintenant moulées à la machine. On est parvenu à vaincre une difficulté considérée longtemps comme insurmontable : la fabrication mécanique des pièces ovales ou elliptiques, ayant deux axes inégaux.

Moulages « à la balle, » « à la croûte » ou « à la housse, » c’est-à-dire par l’introduction de la pâte à l’intérieur ou par son application à l’extérieur du gabarit, dont elle doit épouser les contours, se feront un jour sans doute à la presse, dans des moules métalliques qui aboliront alors le tournage. Dès à présent, avec les machines à assiettes, inventées par M. Faure, l’ouvrier n’a plus qu’à poser sur le tour la quantité de pâte nécessaire à la pièce et tout le façonnage se fait mécaniquement, sans intervention de l’homme.

Le coulage des porcelaines est fondé sur la propriété, que possèdent les moules en plâtre soc, de boire l’eau d’une « barbotine, » ou pâte liquide, dont la partie solide se fige d’elle-même sur les parois internes du moule et en prend exactement la forme. On vide ensuite l’excédent de cette crème de porcelaine. Au séchage, la pâte éprouve un retrait régulier qui permet de la démouler facilement. Sa minceur étant proportionnelle à la faculté d’absorption, c’est-à-dire à l’épaisseur des parois en plâtre, rien de plus simple que d’obtenir ainsi des tasses à thé, à café et autres pièces de « petit creux » extrêmement fines : ce qu’on nomme des « coquilles d’œufs. »

Avant les perfectionnemens modernes, lorsqu’on entreprenait de faire un vase à collet rétréci et qu’il avait acquis la consistance voulue, à peine la barbotine inutile était-elle évacuée que la pâte mal raffermie, ne pouvant se supporter elle-même, s’affaissait, et la pièce était perdue. On imagina d’abord, pour