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Ici, je laisse la parole à l’auteur.


Louis-Philippe était bien l’héritier direct, Guillaume III ne l’était pas ; c’était sa femme, la princesse Marie, qui succédait au trône d’Angleterre à l’exclusion du prince de Galles.

Louis-Philippe était Français ; Guillaume III était étranger. Non seulement le Duc d’Orléans était Français par le sang, mais il l’était par le caractère et l’esprit.

Il avait été élevé dans les idées du XVIIIe siècle ; ses souvenirs de jeunesse se confondaient avec ceux de la Révolution, et il avait vaillamment contribué des premiers à repousser l’invasion étrangère ; le prince d’Orange, au contraire, était encore moins Anglais par les idées que par la naissance ; il aimait peu l’Angleterre et les Anglais.

Le caractère personnel des deux princes n’offre pas moins de contrastes, tous à l’avantage du Français. Autant Guillaume était froid, hautain, taciturne et dur, autant Louis-Philippe s’est montré affable, ouvert et bienveillant. Le premier semblait né pour le gouvernement despotique, le second réalisait l’idéal d’un prince populaire et bourgeois, du chef affectueux d’une nation libre. En permettant cette chute soudaine qui a dévoilé tout ce que les partis avaient si indignement caché ou défiguré, la Providence a vengé Louis-Philippe des calomnies odieuses de ses ennemis.


Cet article, qui eut beaucoup de retentissement, apporta une douce consolation aux derniers jours du souverain exilé. Il se le fit lire à plusieurs reprises et pria M. Guizot de transmettre ses remerciemens à l’auteur. Lavergne était sur le point de se rendre à Claremont pour offrir au vieux monarque un dernier témoignage de respect et d’attachement ; la mort imprévue du Roi l’empêcha d’accomplir ce dessein. Quelques mois après, il partait pour l’Angleterre, avec son ami M. Mon, pour apporter à la famille royale, éprouvée de nouveau par la mort de la reine des Belges, l’hommage de ses condoléances. Il a raconté, au retour, ce voyage et la réception qui lui fut faite à Claremont. On ne lira pas sans intérêt quelques pages de cette relation conservée dans ses papiers.

Les deux visiteurs, en attendant qu’on les introduise dans le château, admirent le parc, dont Lavergne fait une agréable description.


Nous n’étions, poursuit-il, que depuis quelques minutes occupés à contempler ce riant spectacle, quand un grand bruit vint nous avertir que le moment était venu de revenir sur nos pas. Une joyeuse bande