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LES RELATIONS ÉCONOMIQUES
ENTRE
LA FRANCE ET L’ANGLETERRE


I

Après vingt ans de rapports aigres et de froideur diplomatique, la France et l’Angleterre paraissent réconciliées. Les chefs d’État échangent des visites : Edouard VII est reçu à Paris avec la plus courtoise déférence ; Londres accorde à M. Loubet l’accueil le plus chaleureux qu’ait jamais fait la capitale anglaise à un chef d’État étranger. Les parlementaires et les commerçans des deux pays s’invitent et se fêtent aussi ; les paroles les plus aimables pour la France tombent des lèvres des hommes d’État britanniques les plus qualifiés : le premier ministre, le chef de l’opposition et même, pour employer les propres termes de ce dernier, « l’enfant terrible du Parlement, » M. Chamberlain, qui ne nous avait point accoutumés à tant de bonne grâce. Les journaux enfin, après avoir fort contribué à aigrir les relations des deux pays en représentant leurs intérêts comme inconciliables, proclament aujourd’hui qu’il n’est entre eux nul différend qui ne puisse être aisément aplani. De toutes parts on reprend la vieille formule, si décriée naguère, répétée maintenant avec onction, et l’on n’entend parler que d’entente cordiale.

Voilà certes un merveilleux changement. Durera-t-il ? Ne faut-il y voir qu’une détente passagère, chef-d’œuvre de l’habileté diplomatique de notre éminent représentant à Londres, M. Paul Cambon, et de la finesse politique jointe aux goûts pacifiques du