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REVUE DRAMATIQUE

RENAISSANCE : L’Adversaire, comédie en quatre actes, par MM. Alfred Capus et Emmanuel Arène. — VAUDEVILLE : Antoinette Sabrier, comédie en trois actes, par M. Romain Coolus. — ODEON : L’Héritier, par M. Pierre Soulaine. — THEATRE SAINT-BERNHARDT : Jeanne Vedekind, pièce en trois actes de M. Philippi, traduite par M. Luipi Kraus.


Une comédie aimable, gracieuse et inconsistante où manque ce qui donne à une œuvre quelque portée, telle est cette pièce de l’Adversaire que la presse semble avoir pris à tâche d’accabler sous les pavés d’éloges énormes et frappant à faux.

Car une fois de plus nous avons assisté à ce phénomène qui, depuis quelques années, se reproduit invariablement, chaque fois que M. Capus fait représenter une nouvelle pièce. Soulevée d’un même élan, transportée par un même enthousiasme qui se déchaîne en tempête, la critique des journaux tout entière élève l’œuvre jusqu’aux nues. C’est un débordement d’épithètes louangeuses, une débauche de superlatifs, une surenchère dans l’hyperbole. Aucun terme n’avait paru trop fort pour célébrer les mérites incomparables de la Veine, des Deux Écoles, de la Châtelaine, toutes pièces qui tiennent une place un peu mince dans l’histoire du théâtre contemporain ; mais ce n’était rien auprès de l’accueil frénétique qui a été fait à l’Adversaire. Il est amusant de relire, à quelques jours de distance et la fièvre s’étant calmée, les bulletins de victoire rédigés dans la chaleur du premier moment. Un des camarades de M. Arène le plaint galamment d’être l’auteur de la pièce, puisqu’il a été empêché par-là d’en être le juge : « Pour un jour où il croit devoir abandonner son fauteuil de critique, M. Emmanuel Arène manque précisément la pièce la plus profondément jolie et la plus joliment profonde qu’il nous