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trouble et l’exaspère. Il n’y a qu’une façon de juger l’Amérique : comme une gigantesque expérience industrielle, Pendant les cent vingt-cinq années qui représentent sa durée totale son gouvernement a eu pour préoccupation à peu près unique, d’assurer liberté et protection aux fermiers et aux manufacturiers.

La question américaine est des plus simples ; toutes les formes sous lesquelles elle se pose, peuvent être ramenées à une origine unique : la prodigieuse activité qui occupe une foule hétérogène à convertir les ressources d’une contrée vierge en des fortunes fabuleuses. Si à cette prospérité succédaient des temps malheureux, peut-être pourrait-on voir naître un idéal moins matériel que celui d’aujourd’hui. Tant que les chances de « faire de l’argent » resteront ce qu’elles sont aux États-Unis, l’Américain type sera un homme d’affaires ; et, aussi bien dans la politique intérieure que dans la politique étrangère, les affaires seront, aujourd’hui comme hier, le ressort unique de l’énergie, pour l’ancienne comme pour la nouvelle Amérique.

M. Beckles Willson soutient que « cette nation nouvelle est par la nécessité des événemens entraînée vers la concentration des pouvoirs entre les mains du gouvernement fédéral qui logiquement s’achèvera en impérialisme. » Pour asseoir son argumentation, dans la plupart des cas, il en réfère à l’état immédiat des affaires américaines. Sans doute l’intérêt que l’évolution de ces jeunes États-Unis a excité dans le monde est récent, mais il ne marque pas la date de l’existence des États eux-mêmes. Nous demandons la permission de jeter rétrospectivement un coup d’œil sur les phases de leur développement pendant la période de leur obscurité. Peut-être, après cela, pourra-t-on conclure : l’histoire de l’Amérique est moins un chapitre de philosophie politique que le récit d’une courte évolution commerciale, qui, à l’intérieur, a déterminé le caractère américain tel qu’il se révèle en littérature, enseignement, mœurs, finances, et, au dehors, créé les relations qui donnent à une République industrielle une place dans la politique générale du monde.


Jusqu’au 4 juillet 1776, l’Angleterre a possédé treize établissemens (settlements), entre eux distincts, qui ont été connus sous le nom de colonies d’Amérique. Le groupe le plus important fut celui des États de la Nouvelle-Angle terre. Depuis 1620, il avait été occupé par les puritains, par ces réformateurs