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La Grande-Bretagne possède ainsi, sur une foule de points du globe, des stations de ce genre, et il est à croire qu’elle admet que leur occupation est compatible avec le respect de la souveraineté et de l’indépendance des États qui les lui ont concédées. Elle en possède même une à Mascate depuis nombre d’années. En nous accordant un dépôt de charbon, le sultan avait simplement accordé à la France un avantage analogue à celui qu’il avait concédé déjà à l’Angleterre, et il n’y avait dans notre conduite rien d’attentatoire aux droits de qui que ce pût être : c’est ce que fit remarquer à Londres notre ambassadeur, M. Cambon. Le cabinet de Saint-James dut se rendre à ces raisons et, le 4 mai 1899, le gouvernement anglais et le gouvernement français firent d’un commun accord une déclaration portant qu’à Mascate, ils se trouvaient dans une position égale, que par conséquent la France pouvait y établir un dépôt de charbon comme l’Angleterre l’avait fait avant elle. À la suite de cette déclaration, le gouvernement français a pu déposer des tonnes de charbon non à Bender-Isseh, mais en rade de Mascate, à côté du dépôt britannique, dans l’anse de Makalla.

Nous jouissons, dans l’Oman, au point de vue du droit international, d’une situation égale à celle de l’Angleterre. Sans avoir l’intention d’aller à l’encontre des intérêts, voire des droits que le Royaume-Uni a su se créer à Mascate et dans le golfe Persique, sans ignorer non plus que le voisinage d’un grand empire comme celui des Indes crée une sphère limitrophe où il est naturel et légitime que s’exerce la surveillance du gouvernement britannique, nous n’en maintenons pas moins la position que nous reconnaissent les traités, et le jour où l’indépendance de Mascate ferait place à un protectorat officiel du gouvernement britannique, nous serions fondés à réclamer une compensation en échange de l’abandon de nos droits.

D’autre part, plus au nord sur le littoral arabique, à Koweït même, l’action de l’Angleterre a trouvé en face d’elle les résistances de la Porte. On sait que la Turquie prétend exercer un droit de suzeraineté sur la totalité de l’Arabie, tant sur les États du littoral, comme l’Oman et Koweït que sur ceux de l’intérieur, comme le Nedjed. À Koweït notamment, la suzeraineté de la Turquie aurait été accrue de ce fait que le chef de cet État a été nommé kaïmakan et a reçu l’investiture du sultan à la suite de la concession de palmeraies le long de l’Euphrate qui