Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 16.djvu/72

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ose, à cet effet, s’aventurer, en 1636, jusque dans ces enclos sacro-saints de la « fête » parisienne d’alors, la foire Saint-Germain, et cette « Galerie du Palais, » dont Pierre Corneille venait tout justement de glorifier sur la scène les marchandes à la toilette et les libraires. Neuf ans plus tard, sous la « bonne régence, » si tolérante aux joyeuses folies, la Compagnie de Paris revient à la charge, et pourchasse à nouveau ces « sales vaudevilles » imprimés à Troyes, dont s’égayaient à l’envi bourgeois et courtisans. Elle s’attaque même, en 1636 encore, à la prostitution. En 1655, elle poursuit « à ses dépens » le procès d’une fameuse courtisane « qui, appuyée des grands seigneurs, faisait dans Paris, dit D’Argenson, un éclat prodigieux et un scandale plein de triomphe. » Et, lorsqu’en 1659-1660, à la veille de disparaître, elle redouble d’ardeur, elle parviendra à détrôner l’une de ces solennités « gauloises » dont la sottise antique a eu parfois la vie si dure : elle fera supprimer cette « cause grasse » que chaque année, au carnaval, un clerc de la Basoche plaidait au Châtelet. Les Compagnies de province, ici encore, imitaient leur fondatrice. A Dijon, les confrères poursuivaient et les désordres du carnaval et, dans les paroisses rurales, les débauches des fêtes patronales ; — à Laval, les « cabarets dissolus et les jeux déshonnêtes. » — A Marseille, que Paris imita plus tard sur ce point, ils partent en guerre contre le tabac.

Les désordres particuliers de la haute société, à peine moins grossiers que ceux du peuple, ne laissaient pas non plus les Compagnies du Saint-Sacrement indifférentes. Elles combattent le jeu dès 1636, mais sont bientôt obligées de renoncer à « s’en tourmenter, » parce que les tenanciers des tripots s’appuient sur de trop puissans protecteurs. Une fois encore, en 1658, la Compagnie de Paris tentera de détruire ce jeu de hoca où se précipitait la manie du public ; mais, si elle obtient bien[1] quelques arrêts du Parlement, portant l’amende ou la prison, elle n’empêche pas que le jeu nouveau ne pénètre à la Cour, où il trouvera bientôt, dans la jeune reine elle-même, une adepte.

Touchant le duel, la Compagnie fut plus heureuse. C’est en 1646 que le groupe de Poitiers attira l’attention de celui de Paris sur ces tueries de gentilshommes. Sept ans se passent pen-

  1. Allier, p. 120-121.